Aller au contenu

Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 6, 1865.djvu/36

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

la guerre soufflait avec rage et que la résistance n’eût servi de rien, ils se cachaient. Aussi bien, les apôtres faisaient la même chose, ainsi donc, on ne voyait pas toujours les Macchabées, mêlés aux événements, s’élancer au milieu des dangers ; mais parfois aussi, cédant à la nécessité, ils fuyaient et ne se montraient point. Puis, lorsqu’ils avaient repris haleine un instant, semblables à de jeunes lions pleins de courage, ils s’élançaient de leurs cavernes, ils se précipitaient hors de leurs retraites, résolus à sauver non plus seulement eux-mêmes, mais encore les autres, en aussi grand nombre qu’ils en seraient capables ; alors, parcourant la ville entière et toute la campagne, ils recueillaient tous ceux qu’ils trouvaient sains et saufs ; et même parmi les malades et ceux dont la corruption s’était emparée, ils en ramenaient plusieurs, qu’ils persuadaient d’accourir se ranger de nouveau sous la loi observée par leurs pères. Ils leur disaient que Dieu aimait les hommes, et que jamais il ne refusait le salut au repentir. Par ce langage, les Macchabées recrutaient des armées de guerriers généreux ; car ces guerriers ne combattaient pas seulement pour leurs femmes, leurs enfants, et leurs serviteurs, pour conjurer la destruction et l’asservissement de la patrie, mais ils combattaient pour la loi et les principes suivant lesquels vivaient leurs pères, et Dieu même était leur chef. Lors donc qu’ils en étaient venus aux mains, et qu’ils exposaient leur vie, ils défaisaient leurs ennemis, ayant confiance non dans leurs armes, mais dans le motif de leur lutte qui leur tenait lieu de toutes les armes possibles. Eu marchant au combat, ils ne poussaient point de clameurs, ne chantaient pas d’hymnes guerriers, comme font certaines troupes, ils ne faisaient pas venir avec eux des joueurs de flûte, comme cela arrive dans d’autres armées ; mais ils invoquaient Dieu, le priant de descendre parmi eux, d’être leur auxiliaire, de leur tendre la main, lui pour qui ils combattaient, pour la gloire de qui ils soutenaient cette lutte. Voyons (lotie ce qu’elle dit, cette armée de Dieu, fortifiée du secours spirituel, lorsqu’elle va fondre sur l’ennemi. « O Dieu, nous avons entendu de nos oreilles. » C’est qu’il y en avait dans leurs rangs qui, à la vue de la multitude et du déploiement de forces d’Antiochus, de ces troupes victorieuses qui enlevaient tout au premier assaut, et songeant d’autre part à leur propre faiblesse et à leur petit nombre, perdaient une partie de leur fermeté, de leur énergie ; alors, pour réveiller les courages, et faire voir que Dieu est le chef de qui tout dépend, que même sans armées, nous pouvons avoir le dessus, s’il combat pour nous, le Prophète compose pour ses soldats, sous forme de prière, un avertissement, un conseil, et c’est en s’adressant à Dieu qu’il augmente leur ardeur. Cela entre pour beaucoup dans son exhortation. Sa parole n’eût pas eu, interpellant les siens, la même force qu’adressée à Dieu même. Aussi continue-t-il en ces termes : « Ce n’est pas par leur glaive qu’ils ont hérité de cette terre, et ce n’est pas leur droite qui les a sauvés (4). » Ces paroles étaient bien celles d’un homme qui relève des courages faiblissant en face des maux, et cherchant la victoire dans un ordre de choses tout humain. Toute cette prière est donc un encouragement aux soldats, puisqu’elle leur commande de s’en remettre de tout à Dieu, et de rattacher leur victoire à l’espérance des secours d’en haut. Et pourquoi n’a-t-il pas dit simplement : « Nous avons entendu », mais a-t-il ajouté : « de nos oreilles ? » Est-ce que l’on entend par quelqu’autre organe du corps ? N’est-ce point là une surabondance de mots ? À Dieu ne plaise ! mais c’est une habitude générale parmi les hommes, quand ils racontent des choses dont ils ont la certitude, quand le récit a pour sujet des faits graves et très-importants, et s’adresse à des gens qui n’en sont pas encore très-convaincus, d’ajouter toujours cette expression, en disant qu’ils l’ont entendu de leurs oreilles. Nous avons cette habitude, non seulement en ce qui concerne l’ouïe, mais encore à propos de nos autres facultés, prenant ainsi à témoin nos différents sens eux-mêmes. Ainsi, c’est le propre de ceux qui veulent convaincre leur auditeur, d’ajouter cette expression : de mes oreilles. Et il en est de même à l’égard de nos yeux et de nos mains, comme quand nous disons : Nous avons touché de nos mains. Et les apôtres disaient : « Ce que nos yeux ont vu ; ce que nos mains ont touché. » (1Jn. 1,1) Et voyez, dès à présent, ales l’introduction même, la vertu de ces hommes : après tant et de si grands maux soufferts pour Dieu, bannis de leur patrie, privés de leur liberté, tombés au milieu des dangers, plusieurs même d’entre eux, réduits à l’état de fugitifs, s’en allant chercher les montagnes et les déserts, ils ne tiennent pourtant aucun