Aller au contenu

Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 6, 1865.djvu/384

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

CHAPITRE CINQUIÈME.


1. « JE CHANTERAI A MA VIGNE BIEN-AIMÉE LE CANTIQUE DE MON BIEN-AIMÉ. »

ANALYSE.

  • 1. Comparaison d’Israël avec une vigne stérile. Le prophète intitule sa prophétie cantique, bien qu’il n’ait que des reproches à faire, des menaces à lancer ; pourquoi cela ?
  • 2. Dieu énumère, en manière de reproche, les bienfaits dont il a comblé son peuple.
  • 3 et 4. Le Prophète dénonce les malheurs qui fondront sur les Juifs pour châtier leur ingratitude.
  • 5. Malheur à ceux qui s’enivrent !
  • 6. Malheur aux pécheurs endurcis, aux menteurs, aux contempteurs, à ceux qui appellent bien ce qui est mal, et mal ce qui est bien !
  • 7 et 8. Malheur à ceux qui se font à eux-mêmes leur religion, leur morale et leur justice !


1. Après avoir effrayé les Juifs par la menace d’affreux malheurs, les avoir réjouis par l’annonce de grands biens, et avoir usé envers eux de divers traitements, le Prophète recommence son discours, et cela d’une manière qui ressemble au début de la prophétie. De même que dans ce début, il a rappelé les bienfaits de Dieu à leur égard, en disant : « J’ai engendré des fils et je les ai élevés ; » et que leur remettant devant les yeux les iniquités qu’ils ont osé commettre, il ajoute. « Ils m’ont méprisé ; » et encore : « Israël ne m’a pas connu, et mon peuple ne m’a pas compris ; » de même ici, en termes différents, il est vrai, mais avec des pensées identiques, Isaïe nous montre la même chose que d’abord. Mais pourquoi, puisqu’il va accuser, appelle-t-il cantique son accusation ? Moïse a eu raison de donner ce nom au chant qu’il avait compost ; avec Marie, puisque c’était un chant de victoire ; il a eu raison de commencer en ces termes : « Chantons un hymne au Seigneur, parce qu’il a fait éclater sa grandeur et sa gloire, en précipitant dans la mer le cheval et le cavalier. » (Ex. 15,1) Et Débora, après cette merveilleuse victoire et ce triomphe inattendu, eut raison de faire entendre ce chant de triomphe et de rapporter à Dieu toute la gloire. (Jug. 5) Mais Isaïe va accuser, office qui réclame un langage véhément, un ton ferme et sévère, et cependant il nous annonce qu’il va chanter, et il intitule cantique ses reproches. Mais il n’est pas le seul à agir ainsi : Moïse, le grand Moïse, qui avait composé un cantique triomphal, composa aussi, pour reprendre les Juifs, ce long cantique rempli de reproches, où il est dit : « Est-ce là ce que vous rendez au Seigneur ? Ce peuple est fou et insensé (Deut. 32,6) ; » puis il accumula les accusations et ordonna que le peuple le chanterait, et nous aussi nous le chantons encore à présent.
Pourquoi donc ont-ils avec des reproches, composé un cantique ? Ils ont en cela fait preuve de sagesse spirituelle, et ils voulaient procurer un grand bien aux âmes de leurs auditeurs. Car comme il n’y a rien de si utile que le souvenir continuel de ses péchés, et que rien ne produit un souvenir aussi durable que le chant, voulant éviter que des accusations trop souvent répétées ne décourageassent les Juifs et ne les portassent à fuir le souvenir continuel de leurs iniquités, le Prophète a déguisé la honte de ce souvenir sous le chant de l’hymne ; pour adoucir cette douleur qu’ils n’auraient pu supporter, il a composé des cantiques afin que forcés par leur désir de chanter, forcés, dis-je, de les répéter sans cesse, ils s’en souvinssent sans cesse et que le souvenir continuel de leurs péchés leur fût comme une leçon continuelle de vertu. Vous savez que la