Aller au contenu

Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 6, 1865.djvu/390

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

ce jugement ? » C’est-à-dire par cette vengeance.
« Et ils paîtront dispersés comme des taureaux, et les agneaux se nourriront dans les déserts qu’ils auront quittés (17). » Il indique par là le petit nombre de ceux qui resteront, et l’immense désolation du pays. « Malheur à vous qui tirez comme avec une corde vos iniquités et comme avec une courroie vos péchés ; qui dites : Arrive bientôt ce que Dieu doit faire afin que nous le voyions ; que les projets du saint d’Israël se réalisent afin que nous les connaissions (18, 19). » Les prophètes avaient beau menacer continuellement et prédire des choses terribles, les faux prophètes qui ne parlaient que pour être agréables, et qui ôtaient au peuple toute énergie, disaient que ceux-là trompaient, et qu’eux-mêmes étaient seuls dans la vérité. Beaucoup, séduits parleurs mensonges, ne croyaient pas. D’ailleurs les prophéties ne se réalisant pas au moment où elles, étaient annoncées, puisque le propre de la prophétie est d’annoncer les événements longtemps à l’avance, comme les prophètes menaçaient sans cesse de famines, de pestes, de guerres, sans pouvoir jamais les montrer, beaucoup prenaient de là occasion de n’y pas traire et disaient : Vienne ce que vous annoncez ; si vous dite : vrai, que vos paroles se réalisent ; montrez-nous dans les événements actuels la volonté de Dieu. Puis donc qu’ils se faisaient de la patience divine un prétexte pour ne pas croire et qu’à leurs péchés ils en ajoutaient deux autres, d’abord l’incrédulité, puis l’indifférence qu’amenait cette incrédulité, c’est avec raison que le Prophète gémit sur eux en disant : Vous attirez sur vous comme par une longue corde la colère de Dieu et vous aggravez votre malice. Puisque vous n’ajoutez pas foi à nos paroles, il ne vous reste qu’à subir l’épreuve des événements. Ainsi c’est vous qui vous attirez des maux, en refusant de croire à nos paroles. C’est pourquoi il dit : « Malheur à vous qui tirez comme avec une corde vos iniquités ! » c’est-à-dire le châtiment de vos iniquités. Vous attirez de loin, veut-il dire, comme avec une corde la punition que vos péchés ont méritée, comme avec la courroie qui fixe une génisse sous le joug, marquant ainsi le zèle et l’ardeur qu’ils mettent à pécher. Vous ressemblez à celui qui traîne un fardeau au moyen d’une forte courroie, et c’est ainsi que par votre incrédulité vous attirez sur vous la colère de Dieu. Il indique ensuite comment ils l’attirent : « Arrive bientôt ce que Dieu doit faire, afin « que nous le voyions ! » C’est ce qu’un autre prophète leur reproche en ces termes : « Malheur à vous qui désirez voir le jour du Seigneur. De quoi vous servira-t-il, ce jour ? Il n’est que ténèbres sans lumière, qu’obscurité sans clarté. » (Amo. 5,18-19) Ces incrédules aussi disaient : « Quand viendra le jour du châtiment et de la vengeance ? Malheur à vous qui appelez le mal bien et le bien mal, qui changez la lumière en ténèbres et les ténèbres en lumière, qui transformez la douceur en amertume et l’amertume en douceur (20). » C’est toujours la même pensée. Après leur avoir reproché d’insulter les prophètes et de les appeler trompeurs, d’honorer les faux prophètes et de renverser l’ordre des choses, il les appelle encore malheureux parce que leurs jugements sont corrompus. « Malheur à vous qui appelez le mal bien (il désigne par là les paroles des faux prophètes), et le bien mal (les paroles des prophètes), qui changez la lumière en ténèbres et les ténèbres en lumière, qui transformez la douceur en amertume et l’amertume en douceur ! » Les paroles des prophètes sont dures, il est vrai, mais il n’y a rien de plus doux qu’eux, puisque leurs menaces doivent détourner les événements fâcheux. Les paroles des faux prophètes sont douces : mais il n’y a rien de plus amer qu’eux, puisque ces paroles agréables amèneront des punitions trop réelles.
7. Voyez avec quelle sagesse le Prophète a montré la fausseté de leurs jugements. Comme ils s’éloignaient des uns, parce que leurs paroles étaient dures et qu’ils se rapprochaient des autres, parce qu’ils montraient plus de douceur et de complaisance, il leur fait voir que c’est tout le contraire, que les prophètes n’ont que de la douceur et les faux prophètes que de l’amertume. Nous raisonnerons de même sur la lumière et l’obscurité. Les uns conduisaient à l’erreur, les autres à la vérité ; les uns, leur liant pour ainsi dire les mains, les livraient enchaînés à l’obscurité de l’esclavage ; les autres n’omettaient rien pour les amener à la lumière de ta liberté. Comme donc les Juifs avaient de ceux-ci une opinion fausse et défavorable, c’est avec raison qu’il les reprend en disant : « Malheur à ceux qui font de la lumière les ténèbres et des ténèbres la lumière ! Malheur à ceux qui sont sages à leurs propres