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Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 6, 1865.djvu/489

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chers frères, mettre dans tout son jour la tyrannie dont vous faites preuve si souvent envers votre serviteur indigne. Voilà pourquoi il a été si prompt à se taire, à terminer son discours : il a voulu satisfaire à vos désirs, et pour cela il m’a remis l’obligation d’achever le paiement de sa dette. Puis donc qu’il m’a cédé la parole et que je vous vois suspendus à mes lèvres, il faut enfin que je me dispose pour la lutte ; mais venez à mon aide, tendez-moi la main : que vos prières délient rua langue, et qu’une attention intelligente rende votre instruction plus facile ; puisque le prophète ne demande pas seulement la sagesse chez qui conseille, mais aussi l’intelligence chez qui écoute. (Is. 3,3) Car nous n’avons pas aujourd’hui à engager un combat de peu d’importance : mais il réclame de tous, beaucoup de prières ; de vous qui écoutez beaucoup d’attention ; de moi qui parle, beaucoup d’efforts, pour que ma parole soit exacte et juste, et qu’elle pénètre dans vos âmes, mes chers frères, et s’y fixe solidement. Il vous faut non seulement m’entendre, mais vous instruire, non seulement vous instruire, mais enseigner ; non seulement recevoir vous-mêmes la vérité, mais la transmettre. Nous aurons en effet un plus brillant théâtre ; une plus nombreuse réunion, quand ce que vous aurez entendu vous aura servi à amener de nouveaux fidèles.
Dans notre précédente assemblée, vous ayant cité cette parole de l’Évangile : « Mon Père agit toujours, et moi j’agis également (Jn. 5,17) », je vous ai montré partant de là que le Fils est l’égal du Père, conséquence que l’Évangéliste avait déjà explicitement énoncée, en disant : « Ils le poursuivaient davantage, non seulement parce qu’il rompait le sabbat, mais parce qu’il appelait Dieu son père, se faisant l’égal de Dieu (Jn. 5, 18) », et j’ai ainsi terminé mon discours. Aujourd’hui il me faut ruiner les objections que soulèvent les hérétiques à ce propos. Car, quoique en face d’une foule amie, je dois parler avec assez de justesse pour que mon langage soit irréprochable, inattaquable, fût-ce même par-devant des ennemis. En effet, comme je vous l’ai dit déjà, je ne veux pas seulement que vous m’écoutiez, mais aussi que vous instruisiez vos frères. Aussi me suis-je efforcé de vous abriter de toutes parts sous des armes spirituelles, pour qu’aucun de vos membres n’apparaisse à découvert, et ne reçoive une blessure mortelle. Oui, la parole nous est une arme : elle garantit les nôtres, et frappe nos adversaires ; elle les frappe non pour les abattre, mais pour les relever de terre, dans les combats que noirs livrons, c’est pour le salut de l’ennemi que s’élèvent nos trophées. Pour obtenir cet heureux triomphe, prêtez-moi donc votre attention ; rejetez toute pensée mondaine ; tenez votre esprit en éveil, et suivez-moi d’un mil pénétrant. Que le riche ne se laisse pas énerver par la noblesse ; que le pauvre ne plie pas sous les soucis de sa misère ; mais que chacun, bannissant de sa pensée les inégalités du monde, se prépare à entendre : car le sujet que nous avons à traiter est grave.
Et si je reviens sur ces recommandations, c’est que je sais sur quel abîme nous nous avançons. Mais ne tremblez pas à ce mot d’abîme : avec l’Esprit-Saint pour guide, plus de ténèbres sur les eaux, mais partout une route facile, si du moins vous suivez la voie où je vous appelle. Pas de trouble, pas d’effroi. Assurément la question que nous devons agiter aujourd’hui peut commencer par troubler un auditeur d’un esprit superficiel, et par soulever en lui des doutes ; mais s’il attend la fin, quand il verra une solution d’accord avec sa foi, il jouira d’une heureuse paix) et il pourra faire aborder son âme dans un port saris orages. Donc, pour qu’il en soit ainsi, pas de trouble, pas d’effroi ; mais suivez en toute patience, en toute assurance, la voie que vous enseigne ma parole.
Quelles sont les objections de nos contradicteurs ? « Le Fils ne peut rien de lui-même, disent-ils, qu’il n’ait vu faire à son Père. » (Jn. 5, 9) Tel est bien le texte de l’Écriture. Comment donc nous opposent-ils ces paroles ? C’est qu’ils ne les citent pas dans le sens de l’Écriture. En effet, que veulent-ils en conclure ? Voyez-vous, disent-ils, comme le Fils de Dieu repousse toute pensée d’égalité ? Comme les Juifs le soupçonnaient de se prétendre l’égal de Dieu, il leur répond par ces mots : « le Fils ne peut rien de lui-même. »
2. Avais-je tort de dire que ces paroles pouvaient vous troubler, et tout d’abord inquiéter qui les entend ? Mais attendez et vous verrez nos adversaires accablés sous leurs propres armes. Avant tout il ne s’agissait pas d’un soupçon des Juifs ; c’est ce que je vous ai démontré en toute évidence dans notre précédent entretien ;