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Page:Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 6, 1865.djvu/496

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HOMÉLIE SUR MELCHISÉDECH.

AVERTISSEMENT ET ANALYSE.


Cette homélie a été également retrouvée par Eric Benzel dans les manuscrits anglais et publiée par lui à Upsal, elle ressemble en grande partie à la précédente. En effet, quoiqu’elle traite comme l’indique le titre, de Melchisédech, il y en a une bonne part contre les Anoméens. Mais il discute aussi contre les Melchisédécites, qui disaient Melchisédech plus grand que le Fils ; d’autres croyaient qu’il était le Saint-Esprit. Il ne faudrait pas prendre ce discours pour l’homélie sur Melchisédech, dont parle Chrysostome dans son homélie sur le psaume 41. Celle dont il est question en ce passage est la septième contre les Juifs.


Nous n’avons pu trouver de renseignements sur l’époque où fut prononcée cette homélie ; elle ne renferme rien qui l’indique. On ne sait pas davantage si ce fut à Antioche ou à Constantinople : nous pencherions pour Antioche, parce que c’est là qu’il a livré le plus d’assauts aux Anoméens.

  • 1. Trouble causé par l’inexpérience, et sur mer, et dans les orages des passions, et de même dans la lecture des Livres saints – Leur difficulté attestée par saint Paul ; nécessité de les expliquer longuement.
  • 2. Contre les Anoméens : le Christ n’a ni père, ni mère, ni généalogie, c’est-à-dire que ses deux naissances terrestre et céleste, et par suite sa double nature sont insondables.
  • 3. Contre les Melchisédécites : Melchisédech n’est pas plus grand que le Christ, puisqu’il est dit que tout genou fléchira devant le Christ ; il n’est pas le Saint-Esprit, parce que l’incarnation du Christ eût été inutile, si le Saint-Esprit s’était déjà fait homme il est dit sans généalogie, parce qu’il est l’image du Christ ; et le Christ appelé pontife selon l’ordre de Melchisédech, parce que Melchisédech honorait Dieu par le pain et le vin, à l’imitation du Christ qui devait venir plus tard.

1. Je veux vous faire asseoir aujourd’hui à la table des apôtres ; je me dispose à diriger ma course sur une vaste mer, sur la doctrine de l’apôtre Paul. Mais que m’adviendra-t-il ? Je crains, je redoute que, sortis du port et lancés sur l’abîme des paroles apostoliques, nous ne soyons pris de vertige, comme il arrive aux navigateurs novices. Quand ils ont quitté la terre, et que des deux côtés du vaisseau ils ne voient que la mer, et rien autre chose que les flots et le ciel, le vertige s’empare d’eux, et ils s’imaginent que leur vaisseau tournoie avec la mer. Or ce n’est pas de la mer, mais de l’inexpérience des navigateurs que viennent ces étourdissements. D’autres en effet se plongent tout nus dans ses eaux, et n’éprouvent rien de tel : mais descendus dans ses profondeurs, ils y sont plus à l’aise que ceux qui sont établis sur la terre ferme, et, la bouche, les yeux, tout le corps exposé à l’eau salée, ils ne souffrent pas : tant l’inexpérience est un grand et étrange mal ! tant l’expérience est un grand bien ! Celle-ci enseigne à mépriser même ce qui est redoutable ; celle-là dispose à soupçonner et à craindre, même ce qui est inoffensif. Les uns en effet, sur le haut du pont, ont le vertige à la vue seule des flots : les autres, au milieu des eaux, ne se troublent pas. Ainsi arrive-t-il de notre esprit. Souvent il est envahi par les flots des passions, plus terribles que les flots de la mer, et qui, comme une tempête, bouleversent notre âme sous le souffle dés désirs coupables, en jetant le désordre dans toutes nos pensées. L’homme inexpérimenté, ignorant, aux premiers orages de la passion, se trouble, se frappe, se tourmente. Il voit son âme envahie par les flots faire naufrage ! Mais l’homme instruit et prévenu par l’expérience, supporte ces assauts le front haut : comme le pilote au gouvernail, il maintient son esprit ferme au-