Page:Cicéron, Démosthène - Catilinaires, Philippiques, traduction Olivet, 1812.djvu/51

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

17 Quel effet une aversion si marquée fait-elle donc sur vous ! Pour moi, certainement, si je me voyois redouté de mes esclaves au point que vous l’êtes de tous les Romains, je crois que j’abandonnerois ma maison ; et vous ne croyez pas, vous, devoir abandonner Rome ? Si je me voyois suspect et odieux à tous nos Citoyens, quelque innocent que je fusse au fond, j’aimerois mieux renoncer à les voir, que de soutenir leurs regards pleins de courroux : et vous qui savez avoir depuis long-temps par vos crimes, mérité leur haine, et la haine la plus juste, vous continuez à vouloir encore les aigrir par votre présence ? Si votre père, si votre mère, vous haïssoient, vous craignoient, et qu’il ne vous restât aucun moyen de regagner leur amitié, ne vous éloigneriez-vous pas de leurs yeux ? Or, la Patrie, qui est notre mère commune, vous hait, vous craint, et depuis long-temps est convaincue que vous méditez sa perte. Vous n’aurez donc, ni respect pour son autorité, ni soumission à ses volontés, ni crainte de ses châtimens ?

18. Ainsi vous parleroit-elle, si elle vous faisoit entendre sa voix. « Point de crimes depuis tant d’années, point de forfaits, dont vous n’ayez été, ou l’auteur, ou le complice. Vous avez vous seul impunément et librement assassiné nombre de Citoyens, pillé et saccagé les alliés. Vous n’avez pas seulement enfreint les lois, mais vous êtes venu à bout d’anéantir les poursuites de la justice. Tous ces désordres que je n’aurois point dû souffrir, je les ai pourtant soufferts avec le plus d’indulgence qu’il m’a été possible. Mais de me voir à cause de vous en de continuelles alarmes, de frémir