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Page:Compain - La vie tragique de Geneviève, 1912.pdf/108

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LA VIE TRAGIQUE DE GENEVIÈVE

buffet le peu de linge et les quelques assiettes strictement nécessaires à leurs pauvres besoins.

Pour la première fois d’ailleurs, elle allait être chez elle et, si étroit que fût ce coin d’étage qu’on lui avait loué très cher, elle éprouvait une espèce de joie à s’y sentir libre ! Le souvenir d’une autre chambre où elle avait cru trouver le bonheur traversa sa mémoire. La ride que la peine avait tracée à son front se creusa, et une lueur de colère passa dans son regard timide « Ah ! le gredin, murmura-t-elle, dire qu’en ce moment, il boit et fume, je ne sais où avec des camarades, et déclame sur les injustices sociales, sans se soucier de nous deux dont il a fait la misère ! » Elle frémit au souvenir des heures et des mois atroces vécus après le lâche abandon : la fuite éperdue à Paris où elle espérait retrouver la trace de son séducteur ; la solitude dans la foule de la grande ville, les horreurs du bureau de placement, la dissimulation de sa grossesse au cours du service qu’elle avait pris chez des bourgeois, la découverte de son état, l’aveu, le départ. Puis après toutes ces angoisses, six mois