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Page:Compain - La vie tragique de Geneviève, 1912.pdf/151

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LA VIE TRAGIQUE DE GENEVIÈVE

146 aiguille courait alerte. De temps en temps, elle levait vers sa fille un regard inquiet. Qu’elle était faible à vingt-trois ans ! Et elle-même n’était-elle pas une vieille femme à moins de cinquante ans ? C’était la plume qui avait usé ses poumons ; la plume légère qui volette dans. les ateliers où les plumassières composent les fantaisies qui, balancées sur les chapeaux des femmes, font la rue d’hiver plus gaie ! Voici cinq ans qu’après une pneumonie grave elle avait dû cesser d’aller à l’atelier. Heureusement Clé- mence était devenue habile en son métier. Elle gagnait cinq francs cinquante toute l’année chez un grand couturier. Mais elle avait connu la misère dans sa petite enfance, et le sang que lui avait transmis son père, mort trop tard (car il lui avait laissé l’odieux souvenir d’un fou méchant), la laissait faible et vulnérable. Il lui aurait fallu la campagne ou le grand air marin, tandis qu’elle étouffait tout le jour entre les murs d’un atelier mal aéré. Clémence lut dans les yeux de sa mère le dou- loureux travail de sa pensée, elle fit un effort pour secouer son accablement, et demanda :