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LA VIE TRAGIQUE DE GENEVIÈVE


149 un paquet ce matin et qui élève sa petite fille. Bien sûr elle a veillé ce soir ; la concierge veille aussi dans sa loge sur ses myosotis (à elle, du moins, la lumière ne coûte rien) ! Et il y a d’autres femmes qui porteront demain la robe de velours que j’ai faite cet après-midi, le petit manteau neigeux, le jupon, la camisole de pilou, sans se douter des fatigues et des misères qui sont cachées dans leurs points ! J’aime mon métier pourtant ; il est moins malsain que le tien, mais nous n’y faisons guère de vieux os. Elle se tut par tendresse pour sa mère et ajouta : - D’ailleurs, je ne me plains pas pour moi ! je pense aux autres dont la vie est pire ! - Tu réfléchis trop, ma fille ! Trop ? Pas assez, veux-tu dire. Si je n’étais pas abrutie par la fatigue, je ne parlerais pas que pour nous deux, je t’assure. Après un silence, elle reprit d’une voix dont l’ironie se voilait de pitié : - Les petites mains sont contentes ! Il y a du travail pour elles à l’atelier aujourd’hui.