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Page:Compain - La vie tragique de Geneviève, 1912.pdf/215

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LA VIE TRAGIQUE DE GENEVIÈVE

économiser. Ils dormirent dans un grand lit de fer à couverture rayée de bleu et de rouge. Un buffet de noyer où brillaient des tasses à café, à filet d’or, achetées au bazar, orna la salle à manger qu’éclaira une modeste suspension. Enfin, dans leur chambre, une armoire à glace, luxe suprême, que Geneviève n’aurait osé ambitionner, enferma le peu de linge que possédait le ménage. Ils connurent ainsi une joie d’amoureux à arranger au mieux de leurs goûts, ce coin de vieille maison que des cloisons trop minces isolaient des autres locataires, et Geneviève y trouva la jouissance, si douce au cœur d’une femme, d’y travailler au bien-être des siens. Parfois, installée devant sa machine à coudre, car le supplément de son gain demeurait nécessaire, elle se reportait aux jours où, jeune fille ignorante, elle avait rêvé d’un avenir plus brillant. Cette vie de femme d’ouvrier, ouvrière elle-même, était un havre heureux qu’elle avait désespéré d’atteindre. Elle y respirait délicieusement après les tempêtes et les détresses contre lesquelles elle avait si valeureusement