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LA VIE TRAGIQUE DE GENEVIÈVE

voir se couvre d’un voile opaque qu’une ligne de feu déchire soudain. C’est l’orage ; les papiers, les épluchures tombés au fond de la cour se heurtent dans une sarabande ignoble, les hardes s’agitent sur les cordes où elles séchent ; des mains de femmes rentrent hâtivement les caracos sans couleur, les bas troués, le linge en guenilles. L’air fraîchit. Geneviève sent que la pluie approche, à la détente qui maintenant assouplit ses mains nerveuses, apaise son irritation. Son regard adouci cherche Nénette qui, docile, à côté du grand-père, épluche maladroitement une grosse pomme de terre. Elle l’appelle : « Allons viens ici, près de maman, » et ses doigts, piqués de points noirs, caressent la petite tête brune qui se blottit, câline, contre sa jambe.

Enfin le ciel crève ; une volée de grêlons s’abat sur les toits et claque sur les vitres. Puis c’est le fracas d’un tuyau de cheminée qui s’effondre, tandis que des éclairs rouges illuminent la pièce envahie par l’ombre.

— Mon Dieu ! fait Geneviève en serrant dans ses bras la fillette épouvantée.