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Page:Compain - La vie tragique de Geneviève, 1912.pdf/289

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LA VIE TRAGIQUE DE GENEVIÈVE

auprès d’un mort aimé ? Est-ce qu’on peut pleurer quand il faut coudre le soir pour acheter la petite couronne qu’on posera sur la boîte de sapin ?

Elle n’a point pleuré et l’homme qui l’a regardée partir a pensé : « Celle-là, du moins, n’a pas trop de cœur. »

Le lendemain elle est revenue avec la vieille mère de Clémence qui, pour l’accompagner au cimetière, perdait une matinée de travail. Madame Renaud, retenue par la rougeole de son petit garçon n’avait pu venir, mais quelques camarades de Morin s’étaient dérangés pour lui faire la dernière conduite. Deux heures durant, elle a marché, écrasée de fatigue jusqu’au cimetière. Ah ! elle aurait bien voulu qu’il pût dormir seul sous la terre quelques années aussi, comme le grand-père ; mais elle n’a pu songer à réaliser ce désir. Le pauvre enterrement s’en est allé derrière toutes les tombes, jusqu’au ravin sinistre où se couchent les uns à côté des autres, ceux qui, seuls dans la lutte, sont ensemble la proie de la fièvre et des vers.