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le temps d’enlever son chapeau, entra pour
demander les ordres de sa maîtresse.
Varenne, qui était retombé dans la lecture de
son journal, leva les yeux vers elle quand elle
parut, mince et rose dans la robe que Margue-
rite avait portée l’an dernier.
La figure du bel homme exprima soudain
la plus profonde stupéfaction. Avait-il la
berlue ? Était-ce une autre Marguerite qui se
tenait devant madame Varenne dans une atti-
tude respectueuse ? Son regard étonné se
porta sur sa fille, puis sur l’autre ; il se sentit
pâlir. Un souvenir venait de le mordre au
cœur. Il se leva, fit deux tours dans la pièce et
s’en vint tambouriner sur les vitres que la
brume d’automne mouillait déjà. Ainsi il
resta un moment jusqu’à ce qu’un léger bruit
de porte l’eût averti que Geneviève était sortie.
Alors il haussa imperceptiblement les épaules
et murmura en lui-même : « Se peut-il que j’y
songe encore ! » >
A quoi donc avait songé M. Varenne ? Quel
était ce souvenir, terni par les années, recou-
vert de faits innombrables, jeté jadis aux
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LA VIE TRAGIQUE DE GENEVIÈVE