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à ne pas intervenir dans les mesures de Conduite, de Protection ou de Contrôle que le Gouvernement Impérial du Japon pourrait prendre en Corée.

Trois semaines plus tard, c’est-à-dire le 27 Septembre 1905, le second Traité d’Alliance entre le Japon et la Grande-Bretagne était publié. L’Indépendance de la Corée, qui était expressément reconnue dans le premier Traité d’Alliance Anglo-Japonaise, était omise d’une façon très significative dans le renouvellement de cette Alliance.

Cette sinistre omission fut rapidement suivie, vingt-sept jours plus tard, par la conclusion du Traité de Protectorat du Japon sur la Corée. Il ne faut pas oublier de remarquer que cette transaction est sans exemple dans l’histoire du Monde civilisé. (Voir la relation de ce crime dans « Tragedy of Korea » par MacKenzie et « Passing of Korea » par Homer B. Hulbert).

Le Traité de Portsmouth était à peine signé que le Marquis Ito arrivait en Corée et immédiatement prenait vis-à-vis des Coréens des Mesures de Conduite, de Protection et de Contrôle.

Ito, surnommé le « Bismarck du Japon », remplit les rues de Séoul de soldats Japonais, cerna le Palais d’un cordon de troupes et força l’infortuné Empereur et ses Ministres, sous la menace des baïonnettes, à signer le Traité de Séoul. Malgré tout cet appareil coercitif, le Traité ne fut signé ni par le Premier Ministre, ni par le Ministre des Affaires Étrangères Coréens. Ce Traité était donc nul, attendu qu’il n’était pas scellé non plus du Grand Sceau du Conseil d’État ni de celui du Ministère des Affaires Étrangères. Même sous la menace de la force, on ne put jamais trouver le Grand Sceau, et celui du Ministère des Affaires Étrangères fut, par un geste de désespoir, jeté dans un étang au moment ou le Ministre était conduit, sous escorte armée, par les Japonais à la Chambre du Conseil.

L’histoire de la Corée, durant ces cinq années de Protectorat, constitue un record d’actes frauduleux et de terrorisme qui ne se peut concevoir que d’un peuple comme le Japon, dont l’esprit est tout moyenageux, mais dont les méthodes sont toutes prussiennes dans leur cruauté et leur efficacité. C’est tout le raffinement de la barbarie mis en œuvre avec les procédés scientifiques modernes, pour faire périr lentement mais sûrement une Nation toute entière !

VII


L’Annexion de la Corée.

La Corée succomba rapidement, du reste. Pour employer les expressions. d’un écrivain français « le Japon couronnait son œuvre en Corée » par le Traité de Séoul du 22 Août 1910, qui annexait purement et simplement cet ancien Royaume florissant avec sa population de plus de 15 millions d’individus.

Le peuple Coréen, la Nation toute entière n’ont jamais cessé de protester et protestent encore contre cette suppression de la Souveraineté Coréenne, contre l’annexion et la transformation de leur Patrie en une simple province Japonaise !

VIII


Japonisation et Prussianisation.

Cette protestation n’est pas seulement fondée sur la destruction par la force des libertés des Coréens, mais encore sur l’application farouche en Corée, par les Japonais, des méthodes pratiquées par le tsarisme en Finlande et en Pologne-Russe, et par les Allemands, professeurs du Japon du reste, à Posen, au Schleswig-Holstein, et en Alsace-Lorraine, aussi bien que celles qui ont été exercées par le Turc en Arménie !

La politique de cruauté employée pour la prussianisation des Polonais à Posen, des Danois au Schleswig et des Français en Alsace-Lorraine a été dépassée, surpassée par celle appliquée pour la Japonisation de la Corée !

Quoique l’instinct fondamental humain et les barrières géographiques s’opposent a son œuvre en Corée, le Japon est résolu à faire de ce pays, non seulement de nom, mais de fait, une province japonaise. Le Japon tente, par tous les moyens, d’y arriver en détruisant les racines les plus profondes du patriotisme coréen, telles que : l’amour du sol (propriété), la langue nationale et l’histoire du pays. Il contrôle de même très étroitement l’Éducation et la Richesse, ces deux forces qui pourraient paralyser et même détruire tout ce qu’il organise pour étouffer le patriotisme coréen.