XXII
La Maîtrise du Pacifique.
La politique continentale du Japon est aussi bien une menace pour les puissances Anglo-Saxonnes que pour la France, sinon plus dangereuse.
Les Impérialistes japonais déclarent hautement que le surcroît annuel de la population justifie l’extension territoriale inscrite dans le programme de la politique continentale de leur pays. Ils ajoutent que ce « surcroît exportable » (exportable margin) de la population doit être envoyé en Corée, en Mandchourie Méridionale, en Mongolie Orientale Intérieure et dans la Province historique chinoise du Chantoung.
L’émigration de ce « surcroît exportable » pourrait être un grave danger d’ici une cinquantaine d’années, si l’on ne s’apercevait pas que le Japon en fait délibérément une question de propagande exagérée afin de créer un courant d’opinion en sa faveur : considérant que l’émigration japonaise est une nécessité économique et politique impérieuse qui demande une solution immédiate (immediate relief).
La pensée politique japonaise est que cette « solution immédiate » se réalise par la Colonisation Japonaise en Corée, en Chine et éventuellement par l’émigration japonaise en Australie et en Amérique.
Mais les Japonais savent très bien qu’ils ne remplissent nullement les conditions physiques et morales pour cette colonisation soit en Corée, soit en Chine. Leur caractère d’Insulaires les rend absolument impropres à la vie continentale asiatique aussi bien qu’à la vie quasi-désertique de Mongolie.
Il y a certainement des régions habitables pour eux ; mais ces « places au soleil » ont été, depuis des siècles, et sont encore actuellement, surpeuplées par des populations chinoises.
Par conséquent le Japon devra envoyer vers d’autres points son « surcroît exportable », et les publicistes japonais ne font pas un secret que le vœu national est orienté vers les « terres promises » d’Australie et des États-Unis. Quoiqu’ils n’y puissent aller, ils sont décidés à y aller.
De même que le Japon s’était préparé à la guerre contre la Chine et contre l’Empire des Tsars, de même qu’il était prêt lorsque la bonne fortune mît l’Allemagne sur sa route, et qu’il attendait le moment où la France ferait amende honorable, en quelque sorte, en l’appelant à faire partie de la triple indigne interférence, le Japon est prêt dans son travail de préparation qui réalisera complètement ses plans de politique continentale, c’est-à-dire :
Une vive lutte contre les puissances anglo-saxonnes afin de transformer le Pacifique en un « bassin japonais » et de supprimer les lois restrictives contre l’immigrant japonais en Australie et aux États-Unis.
Une politique de conquête mondiale. Conception téméraire, audacieuse, rêve inconcevable, penseront les Anglo-Saxons ; mais de telles idées ne sont pas nouvelles dans l’histoire : la récente Grande Guerre et l’ambition germanique en font foi. Rappelons-nous que les dirigeants du Japon ont organisé leur pays d’après le style prussien, que leur politique continentale, c’est-à-dire leur politique de conquête mondiale, a déjà trouvé des applications et obtenu des résultats :