Page:Conrad - Typhon, trad. Gide, 1918.djvu/126

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brillant et fragile. Sa chemise de coton rayée ouverte sur la poitrine, les muscles de son cou saillaient durs et maigres, une tache noire s’étalait au creux de sa gorge, et son visage était calme, creusé comme celui d’un mort.

Le capitaine Mac Whirr s’essuya les yeux. La lame qui avait failli l’emporter par dessus bord avait, à son grand ennui, arraché son suroît de sa tête chauve ; ses cheveux blonds soyeux assombris par l’eau et plaqués, pendaient en frange autour de son crâne nu, semblables à de misérables écheveaux de coton sale. Avec son visage lavé, empourpré par le vent et les morsures des embruns, il avait l’air de sortir en sueur d’une fournaise.

— « Ah ! Vous voilà ? » grommela-t-il lourdement.

Le lieutenant était arrivé à se glisser dans la timonerie quelques instants auparavant. Il s’était installé dans un coin, les genoux relevés, les poings aux tempes ; cette attitude respirait la rage, le chagrin, la résignation, l’abattement, et une espèce de rancune concentrée.