Page:Conrad - Typhon, trad. Gide, 1918.djvu/142

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M. Rout répéta avec insistance :

— « Il faut vous dépêcher de monter — quoi qu’il en soit. »

Jukes hurla :

— « Êtes-vous là, capitaine ? » puis écouta. Rien. Soudain le mugissement du vent retentit à ses oreilles ; mais bientôt après une voix menue écarta tranquillement les vociférations de l’ouragan :

— « C’est vous, Jukes ? — Eh bien ? »

Jukes ne demandait qu’à raconter : c’est le temps qui semblait manquer. Ce qui s’était passé, on se l’expliquait à merveille. Il voyait en imagination les coolies enfermés dans leur entrepont enfumé, sans espoir d’en pouvoir sortir, couchés pleins de malaise et d’épouvante, entre les rangées de coffres ; puis un de ces coffres, soudain, ou plusieurs à la fois, peut-être, désarrimés par un coup de roulis, culbutant les autres, les couvercles sautant, les côtés éclatant et tous ces malheureux Chinois se levant, bondissant à la fois à la poursuite de leur avoir. Et chaque soubresaut du navire, ensuite, avait précipité cette foule glapissante, trépignante, de-ci, de-là