Page:Conrad - Typhon, trad. Gide, 1918.djvu/85

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

réconfort dans la lueur verte du feu de tribord qui luisait faiblement à travers le pourchas de l’averse et des embruns. Et précisément à l’instant qu’il la contemplait encore, une vague toute droite, que cette lueur désigna, l’éteignit. Il eut juste le temps de voir la crête de la vague s’écrouler, ajoutant son craquement infime à l’effroyable tumulte qui, tout autour de lui, faisait rage. À l’instant suivant la batayolle fut arrachée à l’étreinte de ses bras : d’abord aplati sur le dos, il se sentit ensuite brusquement soulevé, emporté à une grande hauteur. Sa pensée première et irrésistible fut que la mer de la Chine toute entière venait de se vider sur le pont. La seconde pensée, plus saine, fut qu’il venait de passer par-dessus bord. Et tout le temps qu’il se sentit flotter, tandis que le ballotaient, roulaient et culbutaient d’énormes eaux, il n’arrêtait pas de répéter mentalement, avec une extrême précipitation : « Mon Dieu ! Mon Dieu ! Mon Dieu ! Mon Dieu ! »

Tout à coup, dans un sursaut de détresse et de désespoir, une résolution de se tirer