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Page:Constant - Adolphe (Extraits de la correspondance), 1960.djvu/21

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d’ombres, que nous avons prises quelquefois pour des réalités ! Enfin nous trouvons cette réalité désirée : qu’importent les ombres qui nous ont trompés ? Qu’importent de mauvais rêves à l’instant d’un heureux réveil ? Non, rien n’a été profané, car rien de ce qui est nous n’a été possédé. Nous sommes fatigués de songes, mais ces songes n’ont rien de réel et l’impression qu’ils laissent sera fugitive et bientôt oubliée. Vous me trouvez insouciant sur l’avenir : c’est que l’avenir lui-même n’est que le résultat de ces songes. Notre véritable avenir est en nous. J’ignore ce qui nous attend en dehors, mais ce qui est nous, ne sera pas plus flétri qu’il ne l’a été. Autour de votre âme est une barrière divine que rien n’a franchi, que rien de ce qui n’est pas digne de vous ne pourra franchir. Vous êtes vierge pour qui vous comprend et vous apprécie. Oui, assurément je vous dirai : aimez-moi, parce qu’il existe en vous une faculté non employée, et c’est cette faculté qui est mon bien. Je ne connais que vous que le plaisir embellisse, que vous qui portez dans les sensations abandon et pureté, que vous dont la valeur native soit toujours la même, que vous enfin qui soyez une femme comme je les concevais, comme je les ai toujours inutilement cherchées. J’aime à vous entendre, à vous voir, à vous posséder, parce que je vous trouve toujours objet d’amour, de respect et de culte. Ce qu’il