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Page:Constant - Adolphe (Extraits de la correspondance), 1960.djvu/33

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moi maintenant vous remercier d’avoir pris de mes nouvelles, et te répéter encore et encore qu’aucun amour ne saurait être plus tendre ou plus sincère ou plus passionné que le mien. Ce que vous avez pris pour du changement est au contraire le résultat de l’idée que nous sommes unis pour la vie. Cette idée m’a fait porter mes regards autour de moi. Certain de ce qui fait la base de mon bonheur, j’ai senti le besoin de découvrir la route la plus sûre pour le mettre à l’abri des événements. J’ai vu que dans votre situation tout éclat vous nuirait, et produirait en vous-même, par son effet au dehors, une impression qui vous rendrait peut-être à jamais triste et malheureuse. J’ai vu que dans la mienne, entouré d’ennemis, une rupture[1] qui me couvrirait à juste titre du reproche d’ingratitude et de dureté, attirerait les regards sur moi et attiserait les haines. J’ai vu que l’inaction et le silence, pour un homme qui est entré bien volontairement dans les affaires et qui y a contracté par cela même plus de devoirs qu’un autre, était un mauvais parti ; que n’ayant plus la garantie de l’obscurité, il fallait conquérir celle du courage et du talent. Il est résulté de tout cela un besoin de défendre mes idées, de ménager un genre de lien qui n’a rien de commun avec mes sentiments pour vous, de travailler pour le Tribunat et pour

  1. Rupture avec Mme de Staël.