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Page:Constant - Adolphe (Extraits de la correspondance), 1960.djvu/87

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tout est naturel, involontaire, imprévu, les observations générales qu’elle exprime en une ligne, parce qu’elles se présentaient à elle et non parce qu’elle les cherchait, donnent certainement à sa correspondance un mérite de plus. Presque toutes les femmes parlent bien sur l’amour : c’est la grande affaire de leur vie ; elles y appliquent tout leur esprit d’analyse et cette finesse d’aperçus dont la nature les a douées pour les dédommager de la force. Mais comme elles ont un intérêt immédiat, elles ne sauraient être impartiales. Plus elles ont de pureté d’âme, plus elles sont portées à mettre aux liaisons de ce genre une importance, je ne dirai pas, pour ne scandaliser personne, exagérée, mais cependant en contraste avec l’état nécessaire de la société. Je crois bien que Julie, lorsqu’il s’agissait d’elle-même, n’était guère plus désintéressée qu’une autre ; mais elle reconnaissait au moins qu’elle était injuste, et elle en convenait. Elle savait que ce penchant impérieux, l’état naturel d’un sexe, n’est que la fièvre de l’autre ; elle comprenait et avouait que les femmes qui se sont données et les hommes qui ont obtenu sont dans une position précisément inverse. Ce n’est qu’à l’époque de ce qu’on a nommé leur défaite, que les femmes commencent à avoir un but précis, celui de conserver l’amant pour lequel elles ont fait ce qui doit leur sembler