Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 10, 1839.djvu/166

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— Il chante souvent ainsi, dit le jeune garçon à voix basse, lorsque la chanson fut terminée, car ils disent que la dame Vert-de-Mer aime la musique qui parle de l’Océan et de son pouvoir. Écoutez, il m’a ordonné d’entrer.

— Il a seulement touché les cordes de la guitare.

— C’est son signal lorsque le temps est beau. Lorsque le vent siffle et que les vagues mugissent, il appelle plus haut.

Ludlow eût volontiers écouté plus longtemps, mais le jeune garçon ouvrit une porte, et, montrant du doigt le chemin à ceux qu’il conduisait, il disparut en silence derrière un rideau. Les étrangers, et plus particulièrement Ludlow, trouvèrent de nouveaux sujets d’admiration et de surprise en entrant dans la principale cabine du brigantin. L’appartement, relativement à la grandeur du vaisseau, était spacieux et élevé. Il recevait de la lumière par deux fenêtres à la poupe, et il était évident que deux chambres plus petites, une de chaque côté des quartiers, partageaient avec lui cet avantage. L’espace entre ces chambres du conseil, comme on les appelle dans le langage nautique, formait nécessairement une profonde alcôve, qui pouvait être séparée de la partie extérieure de la cabine par un rideau de damas cramoisi qui pendait alors sur une poutre, à laquelle on avait donné la forme d’une corniche dorée. Une pile de luxueux coussins couverts de maroquin rouge était posée près de la traverse, à la manière des divans de l’Orient, et contre les cloisons des chambres du conseil on voyait une agrippine en bois d’acajou, recouverte aussi en maroquin. De petites bibliothèques gracieuses étaient suspendues çà et là, et la guitare dont on avait fait usage depuis si peu de temps était posée sur une petite table de quelque bois précieux, au centre de l’alcôve. Il y avait encore d’autres petits meubles, tels que ceux qui occupent les loisirs d’un esprit cultivé, mais peut-être plus efféminé que vigoureux, répandus dans l’appartement ; suivant toute apparence, les uns étaient négligés depuis longtemps, et les autres paraissaient avoir été plus récemment en faveur.

La partie extérieure de la cabine était meublée dans le même style, quoiqu’elle contînt beaucoup plus des articles qui appartiennent à l’économie domestique. Elle avait ses agrippines, ses piles de coussins, ses chaises en bois précieux, ses petites caisses pour les livres, et ses instruments négligés, entremêlés d’orne-