Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 5.djvu/177

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Et ta mort, que mes vœux s’efforcent de hâter,
Est l’unique degré par où j’y veux monter.
Voilà quelle je suis, et quelle je veux être.
Qu’un autre t’aime en père ou te redoute en maître,
Le cœur de Pulchérie est trop haut et trop franc
Pour craindre ou pour flatter le bourreau de son sang.

Phocas

J’ai forcé ma colère à te prêter silence
Pour voir à quel excès irait ton insolence.
J’ai vu ce qui t’abuse, et me fait mépriser,
Et t’aime encore assez pour te désabuser.
N’estime plus mon sceptre usurpé sur ton père,
Ni que pour l’appuyer ta main soit nécessaire :
Depuis vingt ans je règne, et je règne sans toi,
Et j’en eus tout le droit du choix qu’on fit de moi.
Le trône où je me sieds n’est pas un bien de race :
L’armée a ses raisons pour remplir cette place ;
Son choix en est le titre ; et tel est notre sort,
Qu’une autre élection nous condamne à la mort.
Celle qu’on fit de moi fut l’arrêt de Maurice ;
J’en vis avec regret le triste sacrifice ;
Au repos de l’Etat il fallut l’accorder ;
Mon cœur, qui résistait, fut contraint de céder.
Mais pour remettre un jour l’empire en sa famille
Je fis ce que je pus : je conservai sa fille,
Et, sans avoir besoin de titre ni d’appui,
Je te fais part d’un bien qui n’était plus à lui.

Pulchérie

Un chétif centenier des troupes de Mysie,
Qu’un gros de mutinés élut par fantaisie,