Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 5.djvu/577

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Croiront que votre amour m’a seul justifiée !
Et, si la moindre tache en demeure à mon nom,
Si le moindre du peuple en conserve un soupçon,
Suis-je digne de vous ? et de telles alarmes
Touchent-elles trop peu pour mériter mes larmes ?

Prusias. Ah ! c’est trop de scrupule, et trop mal présumer
D’un mari qui vous aime, et qui vous doit aimer.
La gloire est plus solide après la calomnie,
Et brille d’autant mieux qu’elle s’en vit ternie.
Mais voici Nicomède, et je veux qu’aujourd’hui…


Scène II

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Prusias, Arsinoé, Nicomède, Araspe, gardes.


Arsinoé. Grâce, grâce, seigneur, à notre unique appui !
Grâce à tant de lauriers en sa main si fertiles !
Grâce à ce conquérant, à ce preneur de villes !
Grâce…

Nicomède. De quoi, madame ? est-ce d’avoir conquis
Trois sceptres que ma perte expose à votre fils ;
D’avoir porté si loin vos armes dans l’Asie,
Que même votre Rome en a pris jalousie ;
D’avoir trop soutenu la majesté des rois,
Trop rempli votre cour du bruit de mes exploits,
Trop du grand Annibal pratiqué les maximes ?