Page:Corneille - Dictionnaire des arts, 1694, T1, E-L.djvu/293

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

632 LIT LIT LIV

la vessie, soulage la douleur nephretique, & la difficulté d’uriner, & diminuë la pierre, mais qu’on ne s’en doit servir qu’aprés les purgations universelles, & seulement le matin, plus ou moins selon les pays, les saisons, l’âge & le sexe. Le mot de Lithontribon, vient de lithos, Pierre, & de tribein, Broyer.

LITHONTRIPTIQUES.

s. m. Medicamens qui brisent la pierre & la convertissent en gravelle. Plusieurs Medecins d’un fort grand poids doutent qu’il y ait des remedes qui puissent dissoudre & comme broyer en petites particules la pierre qui est une fois coagulée & bien endurcie. La chose est tres-difficile, à cause que la pierre ou le calcul est une concretion saline salée, composée de l’acide & de l’alcali, & qui estant rassasiée de l’un & de l’autre, ne sçauroit estre dissoute ny par l’acide ny par l’alcali, de sorte que si l’on peut trouver un remede capable de briser le calcul, il faut necessairement qu’il soit d’une nature qui participe à l’acide & à l’alcali, afin de penetrer dans les petits pores du calcul coagulé, où s’insinuant il dissolve les particules salines incorporées ensemble. Pour s’asseurer par l’experience, on jette un calcul dans de certaines liqueurs, afin de connoistre quelle liqueur le brisera & plustost & mieux ; & cette liqueur estant trouvée, on croit qu’on la peut donner pour resoudre le calcul dans les reins & la vessie ; mais ce principe est faux, puis que l’esprit de nitre qui brise presque toûjours le calcul humain exterieurement, ne fait pas la mesme chose, lors qu’il est pris interieurement. Cela vient de ce qu’il prend une nouvelle efficacité & une autre nature, en perdant toute sa force dans l’estomac, par l’alteration que le levain stomachal luy donne, par l’alteration du sel volatile de la bile & du suc pancreatique acide, ou tirant sur le salé ; enfin dans les reins par l’alteration de l’urine. Ainsi les remedes pour briser la pierre, se doivent plustost faire dans le corps humain par le meslange des sucs differens de nostre corps, que de les pretendre tels hors de nostre corps. Cela fait voir que ce n’est point la corrosiveté de ces remedes qui brise le calcul, puis qu’ils ne peuvent parvenir aux reins sans avoir esté alterez, mais que cela arrive par la proportion qui est entre les parties du calcul, & les pores du corps à dissoudre. On doit conclure de là, qu’on peut briser le calcul dans le corps humain, sans qu’il soit besoin de corrosif, pourveu qu’on prenne le soin de preparer des liqueurs & des menstruës que l’on puisse prendre, & qui entrant sans violence dans les pores du calcul, en dissolvent le coagulum.

LITHOPHAGE.

s. m. Petit ver qui se trouve dans l’ardoise, & que l’on appelle ainsi du Grec lithos, Pierre, & de phagesthai, Manger, parce qu’il mange de la pierre & qu’il s’en nourrit. Il est couvert d’une petite coquille fort tendre & fragile, qui est de couleur cendrée & verdastre. Cette coquille est percée à ses deux bouts. Le ver rend ses excremens par l’un de ses trous, & il passe sa teste & ses pieds par l’autre. Ce petit insecte est noirastre, & il a son corps composé d’anneaux, avec six pieds, trois de chaque costé, qui ont chacun deux jointures qui s’articulent ensemble par charniere. On apperçoit dans les couches de l’ardoise les traces de ce ver ; ces traces sont les chemins qu’il se creuse lors que la pierre est encore molle. C’est avec sa reste qu’il marche, car la tirant & la faisant sortir par le petit trou qui est au devant de sa coquille, c’est un point fixe qui luy sert pour avancer, tandis que le reste de son corps s’appuye sur ces petits pieds. Il a quatre machoires qui luy servent de dents. De sa gueule sort un filet dont il bastit sa coquille. Il a


dix petits yeux de couleur noire, cinq de chaque costé, qui sont rangez les uns contre les autres en forme de croissant. On ne sçait pas quelle nouvelle forme cet insecte prend dans la suite, mais il demeure constant qu’il se métamorphose, & que c’est dans sa coquille que se fait ce changement. Un curieux ayant rencontré la nymphe de ce petit ver, en vit sortir plus de quarante vers, tous vivans. Ils avoient la teste noire ; leurs pieds estoient fort visibles, & leur corps estoit jaune en quelques endroits, & rouge en d’autres.

LITISPENDANCE.

s. f. Terme de Pratique. Engagement d’un procez dans une Cour ou Jurisdiction. Ainsi quand on est assigné par devant un Juge, pour une affaire qui a quelque connexité avec une autre qui est pendante ailleurs, on propose la Litispendance, comme une cause legitime d’évocation. Ce mot vient de Lis, Procez, & de Pendere, Pendre.

LIV

LIVRE.

s. f. Terme de compte. Monnoye imaginaire qui se prend en France pour vingt sols. L’origine de ce mot vient de ce qu’anciennement chez les François, la Livre estoit un poids sur lequel la taille de leur monnoye se regloit, & on l’arresta de vingt sols à la Livre. Elle devint dans la suite Livre de compte. Ainsi on appella Livre tout ce qui valoit vingt sols. Les marchez & les contrats ont esté faits, dés le temps de Charlemagne, sur le pied de cette monnoye imaginaire, quoyque les sols ayent changé de poids & d’aloy. Depuis on fabriqua des pieces d’or qui valoient vingt sols, & en 1575. sous Henry II. on en fabriqua d’argent de mesme valeur. On les nomma Francs, ce qui fit que cette monnoye imaginaire devint réelle. On dit en termes de Palais, que les Creanciers seront payez au marc la Livre, au sou la Livre, pour dire, qu’Ils seront colloquez sur des effets mobiliaires à proportion de leur deu. On dit Livre à livre, en termes de Marine, pour dire, Au sou la Livre. Dans les vieux titres on appelle Soixante & douze témoins, Une Livre de témoins, & on a aussi appellé Soixante & douze ans, Une Livre d’années. La raison est que la Livre que l’on appelloit Libra accidua, estoit alors partagée en Soixante & douze sols, ou monnoyes d’or.

Nicod s’est expliqué en ces termes sur le mot de Livre. En fait de poids commun, duquel on use en toutes marchandises debitées au poids, fors que de l’or & de l’argent, la Livre vaut seize onces, & se partit en deux demi-Livres, puis en quatre quarterons, puis en huit demi-quarterons, puis en seize onces, puis en trente-deux demi-onces, puis en soixante-quatre seizains, puis en cent vingt-huit treseaux, puis en deux cens cinquante-six gros, qui s’appellent aussi demitreseaux, puis en cinq cens douze demi-gros, qui est en telles marchandises la derniere espece de poids, mais en fait d’argenterie ou orfavrerie & de monnoyes, la Livre, pesant neanmoins seize onces, se partit en deux marcs, puis en seize onces, puis en six-vingt-huit gros, puis en trois cens quatre-vingts-quatre deniers, puis en neuf mil deux cens seize grains, puis en cent dix mille cinq cens quatre-vingts & douze Karobbes, qui est la derniere espece de tel poids.

Il y a de vieux titres où l’on trouve Livre de terre, C’est un arpent de terre, selon quelques-uns. D’autres veulent que ce soit autant de terre qu’il en falloit pour faire le revenu d’une Livre en argent, suivant la monnoye qui couroit alors dans le Pays.