Page:Cottin - Œuvres complètes, Ménard, 1824, tome 1.djvu/181

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souffert de votre peine, lui ai-je dit. — Je l’ai vu, m’a-t-il répondu, et de ce moment la mienne a disparu. — Comment donc ? — Oui, l’idée que vous souffriez pour moi avait quelque chose de plus doux que le plaisir même ; et puis, quand avec un accent pénétrant vous avez prononcé mon nom : Pauvre Frédéric ! disiez-vous ; tenez, Claire, ce mot s’est écrit dans mon cœur, et je donnerais toutes les jouissances de ma vie entière pour vous entendre encore : il n’y a que la peine de mon père qui a gâté ce délicieux moment ».

Élise, je l’avoue, j’ai été émue : mais qu’en concluras-tu ? Qui sait mieux que toi combien l’amitié est loin d’être un sentiment froid ! N’a-t-elle pas ses élans, ses transports ? Mais ils conservent leur physionomie, et quand on les confond avec une sensation plus passionnée, ce n’est pas la faute de celui qui les sent, mais de celui qui les juge. Frédéric éprouve de l’amitié pour la première fois de sa vie, et doit l’exprimer avec vivacité. Ne remarques-tu pas que l’image de mon mari est toujours unie à la mienne dans