Page:Cottin - Œuvres complètes, Ménard, 1824, tome 1.djvu/40

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nous ? parler de ce qu’on sait est maussade et pédant ; mais le jeune homme décide sur la politique, le magistrat sur la mode, le négociant parle de littérature, le vieillard de galanterie ; chacun parle avec grâce de ce qu’il ne sait pas : voilà le bon ton.

Autrefois on causait doucement ; le ton de la voix était toujours abaissé à un diapason qui semblait être celui d’une chambre de malade. Depuis la révolution, où les événemens ont donné une grande hauteur à toutes les idées, le ton de la voix s’en est ressenti : quelquefois aussi tout le monde parle ensemble, comme dans les anciens chœurs des Grecs. Il serait peut-être assez curieux de rechercher ce qui fait qu’une multitude de bouches se remuent tout à la fois pour produire des sons qu’aucune oreille ne peut recevoir ; serait-ce parce que toutes ces têtes sont pleines ? Et, en effet, lorsqu’elles sont une fois vidées, la conversation reprend peu à peu le ton du bon temps.

La Rochefoucauld dit que la confiance fournit plus à la conversation que l’esprit ; voilà pourquoi la confiance est toujours plus abondante avec un ami. À mesure qu’un ou plusieurs étrangers surviennent, la confiance se