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APOLOGIE

Nous n’avons pas cru devoir passer sous silence cette anecdote, qui ne pouvait être mieux placée que dans l’article du fondateur du prix de poésie ; elle peut fournir aux académiciens vivans un objet de réflexions très-utiles pour eux, sans être néanmoins aussi fâcheuses qu’on pourrait le penser pour la méjnoire de leurs prédécesseurs. Qu’on se mette un moment à la place de ces derniers, qu’on envisage avec eux un roi couvert de gloire, victorieux durant soixante années, n’ayant point encore éprouvé les malheurs qui ternirent les dernières années de son règne ; qu’on voie surtout en lui le protecteur des lettres, le bienfaiteur de tous les talens, enfin le créateur, pour ainsi dire, de sa nation, et l’on excusera l’espèce d’apothéose que lui consacrait une compagnie dont il avait mérité le dévouement à tant de titres. L’esprit philosophique, moins enthousiaste san » doute, mais qui, par ses lumières, est également éloigné du fiel et de la bassesse, nous a appris que la vérité simple loue mieux que l’exagération et l’enflure, un roi vraiment digne d’éloges ; et Louis XIV, moins célébré de nos jours, mais plus sainement apprécié sur ce qu’il a fait de grand et de mémorable, paraît mis enfin, parla voix publique, à la place distinguée que méritent ses qualités réelles, et que lui conservera l’équitable postérité (7).

L’éloge ou l’apologie de ce prince nous a jetés un peu loin de M. de Clermont-Tonnerre, auquel mêmenous ! ne revenons un moment, que pour le quitter sans retour. Nous désirons d’avoir satisfait, ou du moins soulagé son ombre, dans l’article que nous venons de lui consacrer. Mais cette ombre nous saura gré du ïnoins d’avoir associé à sa justification celle d’un roi, que l’évêque de Noyon révérait avec justice, et avec lequel il a eu l’honneur de partager les traits de la satire ; partage bien fait pour consoler ses mânes, et peut-être pour les enorgueillir.

NOTES.

(i) LiETTÉ réflexion, qui met à l’épitaphe ou épigramme dont il s’agit le prix qu’elle mérite, semble nous permettre de l’insérer ici, pour ceux de nos lecteurs qui peuvent aimer ces petits détails ; si elle amuse un moment ces lecteurs peu difficiles, nous sommes sûrs au. moins qu’elle est trop grossière pour scandaliser les autres.

Ci-gît et repose humblement

(De quoi tout le monde s’étonne)

Dans un si petit monument,

Monsieur de Tonnerre en pcrsonn « »