Page:Dante - La Divine Comédie, Le Purgatoire, trad. Ratisbonne, 1865.djvu/19

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dans le monde ? L’Italie est-elle plus heureuse qu’au temps où Dante jetait ce cri de détresse par la bouche de Sordello :

Ahi, serva Italia, di dolore ostello,
Nave senza nocchiero in gran tempesta !

« A-t-elle trouvé, pauvre Italie ! le pilote de son navire battu par l’orage ? »

On le voit, c’est plus que de l’histoire, cette Comédie de Dante ; c’est, et mieux encore aujourd’hui qu’hier, de la politique toute vivante.

Je n’ai pas besoin d’ajouter que c’est aussi de la poésie. Cette poésie ne fléchit jamais, elle change ses couleurs en changeant de royaume ; mais, n’en déplaise à ceux qui s’ennuient au Purgatoire, elle ne fait défaut dans aucun. Le vers âpre et rauque de l’Enfer se détend sans s’amollir dans les régions crépusculaires du séjour d’expiation ; les ombres y semblent baignées dans un clair-obscur vaporeux. Les tourments purificateurs acceptés, bénis par elles, inspirent non plus l’horreur, mais une douce pitié. Leurs plaintes ne sont plus des cris aigus, mais des soupirs. Dans les cercles de l’abîme on descendait au bruit de hurlements farouches, on monte aux degrés expiatoires au son d’hymnes pieuses, de paroles de consolation et d’espérance. L’impression n’étant plus la même, comment l’imagination