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INTRODUCTION.

cette vie terrestre, qu’est-ce que cette vie même ? De là l’insatiable besoin de lumière, de connaître toujours plus, pour aimer toujours plus, pouvoir et agir toujours plus ; de là, dans un travail sans repos, le mépris des obstacles, des fatigues, des souffrances, cette irrésistible impulsion qui force l’homme, jeté sur une mer inconnue, au milieu des écueils, des tempêtes, d’obéir à la voix qui lui crie : Va, suis le soleil !

De ces hautes régions où le Poëte, comme par quelques paroles magiques, vous a transportés, il redescend sur cette terre où, dans leurs passions insensées, s’agitent tristement les mortels misérables. Il est dans le cercle des damnés qui, enveloppés d’une flamme qui les cache à la vue, expient, sous ces vêtements de feu, la ruse maligne, l’imposture, la fourbe[1]. Tout à coup, une voix :

« Si récemment dans ce monde aveugle tu es tombé, de cette douce terre latine d’où j’ai apporté toute ma coulpe,

« Dis-moi si les Romagnols ont la paix ou la guerre ; car je fus des monts, là, entre Urbino et la montagne d’où sort le Tibre[2].

« — O âme là-dessous cachée ! répond Dante, la

  1. Chant xxvii.
  2. Monte-Feltro.