Page:Dante Alighieri - La Vie nouvelle, traduction Durand Fardel.djvu/100

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choses qui ne le sont pas et de choses accidentelles comme si elles fussent des substances et des hommes), il convient que celui qui écrit par rimes en fasse autant, non sans raisons, mais avec des raisons qu’on puisse expliquer en prose.

Que les poètes aient fait ainsi que je viens de le dire se voit par Virgile, lequel dit que Junon, c’est-à-dire une déesse ennemie des Troyens, dit à Éole, maître des vents, dans le premier chapitre de l’Énéide : Eole, namque tibi, etc., et que celui-ci lui répondit : Tuus, O regina, quid optes, etc. Et, dans ce même poète, une chose qui n’est pas animée dit à une chose animée dans le troisième chapitre de l’Énéide : Dardanidæ duri, etc. Dans Lucain la chose animée dit à la chose inanimée : Multum, Roma, tamen debes civilibus armis. Et dans Horace, l’homme parle à la science même comme à une autre personne. Et non seulement Horace parle, mais il le fait presque comme un interprète du bon Homère dans sa Poétique : dic mihi, Musa, virum. Suivant Ovide, l’Amour parle comme s’il était une personne humaine, au commencement du livre de Remedio d’amore : Bella mihi, video, bella parantur, ait. Et c’est par tout cela