Page:De Bougainville - Voyage autour du monde, 1771.djvu/393

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chez le président de justice, et chez le chef de la marine. M. Vanderluys ne nous en dit rien et nous n’allâmes visiter que le dernier.

Quoique cet officier n’ait au service de la Compagnie que le grade de contre-amiral, il est néanmoins vice-amiral des États, par une faveur particulière du stathouder. Ce prince a voulu distinguer ainsi un homme de qualité que le dérangement de sa fortune a forcé de quitter la marine des É tats qu’il a bien servis, pour venir prendre ici le poste qu’il y occupe.

Le chef de la marine est membre de la haute régence, dans les assemblées de laquelle il a séance et voix délibératrice pour les affaires de marine ; il jouit aussi de tous les honneurs des edel-heers. Celui-ci tient un grand état, fait bonne chère et se dédommage des mauvais moments qu’il a souvent passés à la mer en occupant une maison délicieuse hors de la ville.

Pendant que nous restâmes ici, les principaux de Batavia s’empressèrent à nous en rendre le séjour agréable. De grands repas à la ville et à la campagne, des concerts, des promenades charmantes, la variété de cent objets réunis ici et presque tous nouveaux pour nous, le coup d’œil de l’entrepôt du plus riche commerce de l’univers ; mieux que cela, le spectacle de plusieurs peuples qui, bien qu’opposés entièrement pour les mœurs, les usages, la religion, forment cependant une même société ; tout concourait à amuser les yeux, à instruire le navigateur, à intéresser même le philosophe. Il y a de plus ici une comédie qu’on dit assez bonne ; nous n’avons pu juger que de la salle qui nous a paru jolie : n’entendant pas la langue, ce fut bien assez pour nous d’y aller une fois. Nous fûmes infiniment