Page:De Bougainville - Voyage autour du monde, 1771.djvu/408

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l’état véritable de ces îles, et le nuage mystérieux qui enveloppe ce jardin des Hespérides. Mais il est des difficultés que la force de l’homme ne peut vaincre, et des inconvénients auxquels toute sa sagesse ne saurait remédier. Les Hollandais peuvent bien construire à Amboine et à Banda des fortifications respectables, ils peuvent les munir de garnisons nombreuses ; mais, après quelques années, des tremblements de terre, presque périodiques, viennent renverser de fond en comble tous ces ouvrages, et chaque année la malignité du climat emporte les deux tiers des soldats, matelots et ouvriers qu’on y envoie.

Voilà des maux sans remède. Les forts de Banda, bouleversés ainsi il y a trois ans, sont à peine reconstruits aujourd’hui ; ceux d’Amboine ne le sont pas encore. D’ailleurs la Compagnie a pu parvenir à détruire, dans quelques îles, une partie des épiceries connues ; mais il en est qu’elle ne connaît pas, et d’autres même qu’elle connaît et qui se défendent contre ses efforts.

Aujourd’hui les Anglais fréquentent beaucoup les parages des Moluques, et ce n’est assurément pas sans dessein. Il y avait plusieurs années que de petits bâtiments qui partaient de Bancoui étaient venus examiner les passages et prendre les connaissances relatives à cette navigation difficile. On a lu que les habitants de Button nous ont dit que trois navires anglais avaient depuis peu passé dans ce détroit ; nous avons aussi parlé des secours qu’ils ont donnés à l’infortuné souverain de Balimbuam, et il paraît certain que c’est d’eux aussi que les Ceramois tirent de la poudre et des armes ; ils leur avaient même construit un fort que le capitaine Le Clerc nous a dit avoir détruit, et dans lequel il a trouvé deux canons. En 1764, M. Watson, qui commandait le Kinsberg, frégate