Page:De Musset - Voyage en Italie et en Sicile, 1866.djvu/125

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J’ai toujours admiré ces Anglais qui parcourent le monde sans s’attacher aux gens ni aux choses. La vie est pour eux comme une lanterne magique et, par une juste réciprocité, ils ne sont pour les autres que des ombres chinoises. C’est ainsi qu’ils remplissent, avec exactitude, leur but d’être seulement des gentilshommes anglais qui voyagent et, comme cet avantage ne leur échappe jamais, je les crois parfaitement heureux. Nous autres, fous de Français, nous sommes à peine arrivés dans une ville que nous perdons de vue le but proposé. Nous sommes touchés de la bienveillance qu’on nous témoigne, nous faisons amitié avec les gens et, Dieu me pardonne ! nous allons quelquefois jusqu’à nous brûler aux flammes d’une paire de beaux yeux. Alors nous manquons à l’itinéraire réglé d’avance, nous séjournons six mois où l’on ne devait rester que huit jours et, quand il faut absolument partir, nous avons le cœur serré, la larme à l’œil et nous oublions, à l’auberge, notre manteau de caoutchouc.

Ainsi ai-je fait, le 8 avril, lorsque je suis monté à