Page:De Musset - Voyage en Italie et en Sicile, 1866.djvu/160

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pas. Le guide qui nous avait amenés nous ayant rejoints avec ses deux mules, je repris ma monture de la veille et je laissai le seigneur anglais dans sa boîte. J’arrivai de bonne heure à Catane, cherchant une excuse à donner à miss Nancy pour mon absence de trois jours et ne trouvant que des raisons détestables. Je courus à l’hôtel de la Couronne. Le patron m’apprit qu’un bateau à vapeur était venu la veille à Catane et que la jeune miss s’était embarquée pour Malte avec son père.

— Cette aimable demoiselle, ajouta ce maudit homme, a écrit un beau certificat de contentement sur le livre de mon auberge.

— Donnez-moi vite le livre, que je voie ce certificat.

Il était impossible qu’il n’y eût pas quelque petit mot dont le véritable sens ne devait être intelligible que pour moi. J’ouvris le registre d’une main tremblante. Une page entière était couverte de cette écriture gracieuse et penchée que possèdent toutes les jeunes-filles de la Grande-Bretagne. Miss Nancy commençait par louer le zèle et les soins de M. Abate, le patron de la Couronne. Ensuite elle se plaignait de n’avoir point trouvé de beurre frais depuis sa sortie de Naples ; puis elle terminait le morceau par cette réparation éclatante faite à la Sicile et que je transcris textuellement :

« I beg to recommend, in very strong terms, the ricotta of the country. In many parts of Italy it is preferable to the butter and, if fresh, is always excellent ; but as prepared by signor Abate’s direction it is supra-excellent and would be an acceptable addition to any English breakfast table. »