Page:De Musset - Voyage en Italie et en Sicile, 1866.djvu/199

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consécutives méritent bien qu’on délibère. Nous allions entrer dans le mois de mai, le soleil prenait tous les jours une force effrayante. Les symptômes de la grande chaleur commençaient à paraître. Des mille-pieds logs de deux pouces couraient sur les murs avec une agilité merveilleuse ; les scarafones sortaient de leurs trous par bataillons et il n’y avait qu’à soulever des pots de fleurs pour y trouver des groupes de scorpions entourés de leurs nombreuses familles. Le vent maintenait bien un peu de fraîcheur dans l’air mais, depuis le matin, il tournait au sirocco et, pour peu qu’il se fixât au sud, la Sicile pouvait devenir tout à coup une vaste fournaise.

— Puisque vos seigneuries, disait Luigi, ont déjà vu Syracuse, nous ne ferions que la traverser et nous irions coucher, le second jour, à Noto où l’auberge est bonne.

— Et pourquoi ne parlez-vous pas de la première nuit ? demandai-je au guide.

— Si je n’en dis rien à vos excellences, c’est qu’elle sera parfaite. Nous la passerons dans la jolie petite locanda de Priolo.

— Priolo, m’écriai-je, vous appelez cela une jolie petite locanda ! Revenez demain, Luigi, je veux réfléchir encore.

— Et pendant l’heure de la chaleur, demanda M…, où nous reposerons-nous ?

— Dans un endroit délicieux, fait exprès pour le rinfresco et qu’on nomme Fondaco della Palma

— Revenez demain, Luigi, revenez demain.

Le lendemain, une affiche étalée sur les murs de notre hôtel annonçait que le bateau à vapeur le Duc de Calabre ferait, dans la nuit du 3 au 4 mai, le trajet