Page:De Musset - Voyage en Italie et en Sicile, 1866.djvu/212

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petite église voisine de Saint-François de Paule, fit demander la permission d’entrer dans le jardin. Le prince, n’ayant rien à craindre pour ses plates-bandes, ouvrit ses portes. La procession entra, musique en tête, accompagnant la statue en argent du saint et suivie d’une grande foule du peuple. Avant qu’on eût achevé le tour du jardin, les assistants virent clairement la statue lever son bras et donner sa bénédiction à la maison, au terrain et sans doute aussi au complaisant propriétaire. On parla beaucoup de ce miracle et on pensa que l’hôtel du prince P… s’en trouverait bien. En effet, en moins de trois ans, la place fut remplie de plantes rares et précieuses, d’arbres de tous les pays, de fruits succulents et de fleurs délicieuses. Tout cela sortit de la terre bénite en profusion, pour faire le plus riche parterre de Palerme. Personne n’a de doutes à ce sujet, excepté le prince qui m’a paru soupçonner son jardinier et les sommes énormes qu’il a dépensées, d’avoir aidé puissamment Saint-Vincent de Paule dans ses bonnes intentions.

Le soir, nous allâmes au théâtre Ferdinando, où une troupe, fort mauvaise, jouait une comédie nouvelle si médiocre que ce n’est pas la peine d’en parler. L’Opéra, dont notre ancienne connaissance Ivanoff avait fait les beaux jours pendant la saison d’hiver, était fermé depuis les fêtes de Pâques. J’ai regretté plus encore Pasquino de Palerme, qu’on dit aussi comique et aussi amusant que les polichinelles napolitains, ce qui me semble difficile à croire. Pasquino faisait une tournée dans la province.

Etant obligés de renoncer à voir ces acteurs spirituels qui reproduisent les mœurs du peuple, nous primes