Page:De Musset - Voyage en Italie et en Sicile, 1866.djvu/278

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ans, jaunes comme des citrons et vives comme des oiseaux, qui bondissent devant nos ânes en faisant sonner les rochers sous leurs pieds nus. Après une heure de marche, on commence à entendre le vacarme de la cascade. De petits ruisseaux qui se détachent de la grande masse d’eau courent se précipiter dans l’abîme. Tant qu’on n’est pas sur le lieu de la scène, on éprouve, au milieu de ce bruit, un sentiment d’inquiétude semblable à celui que vous inspire l’intérieur d’une usine. La montagne de Terni peut rappeler les plus beaux sites de la Suisse, mais relevés par l’ardeur du climat et la végétation méridionale. Au sommet poussent le chêne et le sapin ; au bas, l’olivier, l’oranger et les plantes du Sud. Le Vellino, dont le volume d’eau est presque aussi considérable que celui de la Marne, se jette d’une hauteur de plus de trois cents pieds. Les Romains, fatigués de ses inondations, le détournèrent de son cours naturel pour se défaire de lui en l’amenant à ce précipice. Depuis lors, la nature a effacé les traces du travail en le cachant sous les arbres, la mousse et les ronces. Il n’en est pas de même à Tivoli, où l’on reconnaît trop clairement la main de l’homme. Lorsqu’on suspend sa tête au-dessus de la cascade de Terni, il faut avoir le cerveau libre et les nerfs en bon état pour résister au vertige. En se brisant sur les rochers, l’eau rejaillit en nuages blancs qui dérobent aux regards le fond de l’abîme. Les rayons du soleil forment, dans ces nuages, des arcs-en-ciel superposés qui se balancent et se croisent. Après avoir regardé du haut de la montagne, il est bon de renvoyer les ânes et de descendre à pied par un sentier qui mène aux rochers où le Vellino