Page:De Musset - Voyage en Italie et en Sicile, 1866.djvu/303

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amène. Si nous entrons ensemble, nous nous ferons tort réciproquement : jouons à qui passera le premier.

— J’y consens, répondit Andronic ; le sort en décidera.

Ils jouèrent à la murra et Matteo, ayant gagné la partie, entra dans la maison, tandis que l’autre attendait dans la rue. Le curé était au jardin et travaillait à bêcher une plate-bande.

— Monsieur le curé, lui dit Matteo, je ne suis pas riche, mais je vous apporte un paolo de plus en faveur des incendiés.

— C’est bien, mon ami, répondit le bonhomme ; voici ma nièce qui va joindre cet argent au produit de sa quête.

— Il me semble que vous m’avez déjà donné, tout à l’heure, à l’église, dit la jeune fille d’un air malin.

— En effet, reprit l’étudiant ; mais j’ai oublié cette pièce au fond de ma poche et je ne veux pas qu’elle soit perdue pour la charité. C’est aussi une occasion de voir une jolie giovinetta qui a des yeux admirables et de causer avec monsieur le curé, s’il veut bien le permettre.

— Causons, mon ami, cela ne fait de mal à personne. Souffrez seulement que je continue à bêcher ma plate-bande et asseyez-vous sur ce banc.

Matteo, enchanté de ce bon accueil, s’assit sur le banc de bois, mais si lourdement qu’il le brisa par le milieu et tomba sur le dos. Fioralise éclata de rire et le curé se mit dans une colère épouvantable. Ne vous fâchez pas, mon oncle, dit la jeune fille ; il est fort heureux que cette planche se soit rompue aujourd’hui, car demain vous auriez pu la