Page:De Musset - Voyage en Italie et en Sicile, 1866.djvu/321

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pour la perfection du service, est dédié aux récréations de la jeunesse intelligente et laborieuse de l’université de Padoue. Celui qui l’a fait construire, M. Pedrocchi, passe pour avoir trouvé, dans les caves de sa maison, un trésor enfoui du temps d’Alaric, si ce n’est même une lampe merveilleuse comme celle des Mille et une Nuits. Chaque siècle produit ses grands hommes. Padoue compta, jadis, Pétrarque parmi les chanoines de son église, Galilée parmi ses professeurs ; elle a aujourd’hui M. Pedrocchi, le César des limonadiers.

Les voiturins, et généralement tous les individus avec qui on fait un marché quelconque en Italie, n’ont qu’une idée, celle de vous tromper. Quarante mensonges et deux heures de démarches diplomatiques ne leur coutent rien pour vous arracher ce qui ne leur est pas dû. Nous avions remarqué, depuis Rovigo, que notre conducteur avait changé de figure. D’un homme de taille moyenne qu’il était à Ferrare, il se trouvait transformé en un colosse de six pieds avec un visage couvert de dartres. Le Ferrarais nous avait vendus sans permission à son confrère, personnage retors dans l’art d’exploiter l’étranger. Le Padouan ne manqua pas de nous demander, à chacun, une piastre de plus que le prix convenu avec son camarade. Après toutes les protestations imaginables, les prières, les serments les plus saints, il arriva, par la progression usitée, jusqu’à la menace de nous citer devant la police ; mais, à sa grande surprise, la piastre désirée ne sortit point de nos poches. Notre refus étant formel, le voiturin fit semblant d’aller à la police. Il descendit l’escalier d’un air furieux et remonta aussitôt.