Page:De Musset - Voyage en Italie et en Sicile, 1866.djvu/75

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Napolitains de venir à leur secours dans des circonstances périlleuses où un chef était nécessaire. Il vendit ses bijoux et son argenterie, partit de Rome avec quelques gentilshommes français, braves et aventureux comme lui et, à travers mille dangers, vint aborder Naples où on l’accueillit avec un enthousiasme poussé jusqu’à l’ivresse. Il disciplina de son mieux des troupes fort mauvaises, rétablit le bon ordre par son courage et sa fermeté, en brisant plus d’une fois sa canne sur la tête des lazares, comme il disait dans son langage de grand seigneur. Pendant six mois, il lutta contre les armées espagnoles avec avantage. Le cardinal Mazarin l’abandonna et les insurgés le récompensèrent de ses peines en le vendant à Don Juan d’Autriche qui l’envoya prisonnier à Madrid. Il était juste au moins qu’après tout cela on daignât se souvenir de M. de Guise et reproduire dans l’histoire de la révolution quelques-unes de ses prouesses. On s’en garda bien. Salvator Rosa lui-même, qui fut en correspondance avec ce prince, du haut des Abruzzes, n’a pas fait un seul tableau sur cet épisode héroïque. Avant d’aborder en Calabre, Murat aurait dû se rappeler l’exemple de Henri de Lorraine et retourner en arrière.

En fait de spectacles, notre manie de nouveauté n’approche pas celle des Napolitains. Nous négligeons plutôt nos idoles que nous ne les brisons, semblables à ces femmes galantes dont le cœur est bon et qui se font des amis de leurs anciens amants. Nos théâtres reviennent volontiers aux vieux ouvrages et leur conservent toujours une place dans le répertoire. Si le goût du jour s’en éloigne trop, on joue encore des fragments ; le Conservatoire s’en empare