Page:De Musset - Voyage en Italie et en Sicile, 1866.djvu/81

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

serrés à la ceinture par des coulisses et plissés du haut en bas. Son bonnet de laine blanche est droit comme une mitre d’évêque ; un demi-masque noir avec un long nez cache la moitié du visage et forme, dans les traits, un contraste piquant de grimaces et d’immobilité. La vieille, d’un embonpoint qui déborde, se farde les joues, affecte les prétentions et les parures de la jeunesse, se charge les doigts de bagues et le cou de colliers. A San-Carlino, ces emplois à caractère, surtout celui de Pancrace et de la vieille, sont joués par des artistes d’un véritable talent et d’un naturel exquis; jamais leurs farces les plus outrées n’atteignent le point où le rire et la gaieté se changeraient en fatigue ou en dégoût.

Dans le reste de la troupe, il y a encore des acteurs de mérite : trois hommes doués de physiques hétéroclites et qui reproduisent des figures populaires, un amoureux d’assez bonne tournure pour l’endroit, une jeune première petite, robuste et chevelue, type exact de la brunette napolitaine au cœur fantasque et à la tête chaude ; une autre actrice jeune et belle, d’une physionomie énergique et qui remplit admirablement les rôles de servante ou de femme du peuple.

Mais le plus intéressant de tous est l’acteur-auteur nommé Altavilla, l’âme et le soutien de la compania de San-Carlino. Il remplit tantôt les rôles qui répondent à ceux de Gonthier dans nos vaudevilles, tantôt d’autres plus comiques ou de caricature, car il est excellent mime et son visage, d’une mobilité extraordinaire, se prête à toutes sortes de bouffonneries. Ce qui élève Altavilla au-dessus de ses confrères, c’est qu’il est le Molière de la troupe. Depuis plusieurs années, quoiqu’il paraisse à peine âgé de