Page:De Scudery - Alaric, ou Rome vaincue, 1654.djvu/181

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Estre esgal à ces rois pour les pouvoir dompter ;
Et descendre du thrône avant que d’y monter.
Ne flattons point nos cœurs d’une vaine esperance ;
Puis qu’elle est sans le prince elle est sans aparence ;
Ce heros n’estant plus nostre camp est deffait ;
Et la cause cessant on voit cesser l’effet.
Les roys ne meurent point, replique Radagaise,
Un retour si honteux n’a rien qui ne desplaise :
Et perdant ce heros que le sort nous ravit,
Amalasonthe regne, Amalasonthe vit.
Suivons, suivons du roy les desseins magnanimes,
Et par là faisons voir ses armes legitimes :
Allons, braves guerriers, apres mille hazards,
Luy faire un vain tombeau du thrône des Cezars :
Achevons son voyage ; achevons sa victoire ;
Puisque ce prince est mort faisons vivre sa gloire ;
Et sans nous amuser à des pleurs superflus,
Faisons le triompher, lors mesme qu’il n’est plus.
En pensant nous servir vostre cœur nous veut nuire,
Sa valeur le seduit comme il nous veut seduire,
Luy respond Theodat, mais dans nostre malheur,
Faites que la raison regle cette valeur.
D’un projet incertain la fin est incertaine :
Nous n’avons plus un roy, nous avons une reyne :
Bien loin de la servir, c’est faire un attentat :
Et partir sans son ordre est un crime d’estat.
De cette ambition rejettons les amorces :
Tout roy qui monte au thrône à besoin de ses forces :