Page:De Scudery - Eudoxe, tragi-comédie, 1641.djvu/35

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Entre dans le tombeau, fait qu'elle puisse enfin,

Quand tu ne seras plus, obéir au destin ;

Il est juste, il est juste, autant qu'elle est fidèle ; [555]

Tu ne méritais pas l'honneur d'être aimé d'elle.

Tu fus trop téméraire, et l'orgueil te perdit,

Qu'un roi l'emporte donc : mais lâche qu'as-tu dit ?

Celle dont la vertu n'aura point de seconde,

Celle qui commandait à la moitié du monde, [560]

Qui tenait en ses mains l'empire d'occident,

Souffrira donc enfin un si triste accident ?

Et tu pourras souffrir qu'un vandale, un barbare

Emporte insolemment une beauté si rare ?

Tu mourras sans le perdre, et sans la secourir ? [565]

Ha ! Lâche, meurs plutôt, d'avoir voulu mourir.

Entends, entends la voix de la triste princesse,

Qui se mêle à ses pleurs, qui t'appelle sans cesse,

Qui signale en ce lieu son amour et sa foi,

Et qui semble te dire, Ursace, sauve-moi. [570]

Pardonne, chère Eudoxe, au dessein qui te fâche :

Ce cœur est affligé, mais ce cœur n'est point lâche.

Il a voulu mourir, te voyant enlever,

Il veut vivre et mourir, afin de te sauver.

Allons, allons, Olimbre, où la fureur m'emporte ; [575]

Il n'est point de palais, ni de garde assez forte,

Pour retenir un cœur qu'on ne peut surmonter.

Le trône a des degrés par où l'on peut monter :

C'est en vain qu'un tyran y veut cacher son crime ;

Qui ne vit point en roi, n'est pas roi légitime ; [580]