Page:Delécluze - Romans, contes et nouvelles, 1843.djvu/123

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causent de pareils travaux. Après ces mots Olimpia baissa doucement la tête en signe de respect et continua :

Tous les Barberins, frappés de crainte et poursuivis par la haine publique, s’échappèrent de Rome. Malgré la bulle par laquelle vous fîtes défense aux cardinaux de sortir sans ordre de l’état ecclésiastique, Antoine s’enfuit en France, et peu de jours après, son frère le cardinal François, puis son cousin Tadée Barberin, qui sut si bien amasser l’or à Palestrine pendant son gouvernement de Rome, l’y rejoignirent, traînant avec eux toutes celles de leurs richesses qui étaient transportables ; et vous savez qu’elles s’élèvent à des sommes immenses.

— À quatre millions de ducats d’or, selon l’évaluation de Pancirole.

— Plus encore ; mais peu importe. La France prit fait et cause pour les Barberins, ou au moins se servit de leur exil comme d’un prétexte pour jeter des embarras dans la politique du Vatican. Elle exigea de vous leur rappel en Italie. Bien plus, elle prétendit qu’on les réintégrât dans tous les bénéfices dont ils avaient joui. Mais vous fûtes courageusement habile dans les refus constants que vous avez opposés à cette bienveillance hypocrite. Voyant que cette ruse était sans effet, Mazarin crut devoir y substituer la force et la violence ; et une flotte française fut envoyée pour soutenir l’autre partie de l’armée qui faisait le siége d’Orbitello[1]. Le projet qu’avait le cabinet de France de nuire aux Espagnols à qui cette place appartenait, et surtout le désir de s’approcher de Rome pour vous faire des menaces plus pressantes, ne fut pas satisfait cette fois, puisque les Français furent forcés de lever le siége. Mais, toujours plus persévérant et plus implacable dans ses projets, Mazarin compta pour rien cet échec, remit des vaisseaux en mer et fit emporter d’assaut, deux mois après, Porto-Longone et Piombino.

— Ce monstre de Mazarin ! s’écria le pape en se soulevant avec vivacité sur son siége.

— Ah ! mon frère ! reprit dona Olimpia après avoir calmé le

  1. En Toscane.