Page:Delécluze - Romans, contes et nouvelles, 1843.djvu/233

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vous mieux son frère Fabiano ? — De la compagnie de Jésus ? Ah ! celui-là a une meilleure tête !... Mais il a peu de souplesse dans l’esprit, et tout bien considéré, je ne veux pas trop agrandir cette famille. Elle a déjà deux de ses membres pourvus de dignités : cela doit lui suffire. — Il ne s’en présente guère d’autres à ma mémoire ; car je ne suppose pas que Julio Aldobrandini vous convienne. — Ah ! mon cher Pancirole ! où allez-vous chercher celui-là, pour me rejeter encore au milieu de ces femmes dont je ne veux plus entendre parler ! Julio ! le cousin de la princesse de Rossano, y pensez-vous ? » Malgré son flegme, le vieux diplomate ne put s’empêcher cette fois de sourire en voyant la colère du pape. « N’en parlons plus, n’en parlons plus, saint-père, dit-il en plaisantant ; mais maintenant que j’ai épuisé toutes mes ressources, faites valoir les vôtres. — En vérité, dit le pontife, ce choix est plus difficile à faire que je ne l’aurais cru. Que diriez-vous de Mascambruno ? — Je n’ai rien à vous dire de lui en ce moment, répondit Pancirole en appuyant sur les deux derniers mots ; mais vous oubliez que Mascambruno, entièrement dévoué à dona Olimpia, ne deviendrait pas précisément le cardinal ministre qui pût l’empêcher, comme vous paraissez le désirer, de prendre part aux affaires d’état. — Vous n’aimez pas Mascambruno, Pancirole. — Vous l’aimez trop, saint-père. »

En faisant cette réponse, le ministre montra un front sévère ; mais il revint bientôt à la question principale, et son visage ayant repris du calme, il dit à Innocent : « La nécessité d’un cardinal neveu étant reconnue, ce qu’il y aurait peut-être de mieux pour en faire un serait de le choisir parmi ceux sur lesquels on se doute le moins que dût tomber cette faveur. En pareille circonstance, saint-père, on risque toujours beaucoup moins en excitant l’étonnement du public que la jalousie des gens qui, par leur naissance et leur position, se figurent qu’ils ont des droits à l’emploi que l’on donne. Après tout, que devez-vous chercher dans un cardinal patron, qui ne sera là que pour devenir l’interprète de vos volontés, pour vous suppléer pendant les éternelles audiences journalières, pour faire des réponses évasives, pour