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Ludovisi, le prince de Piombino, avait une chance de rentrer dans la possession de son bien. En conséquence, le nonce s’empressait d’avertir le pape de tenir toutes ses galères prêtes, et de les envoyer, sous le commandement du prince Ludovisi, rejoindre le comte d’Ognate, alors vice-roi de Naples, chargé de diriger l’expédition contre les Français.

À peine l’abbé Segni eut-il fait part de son message, que Pancirole rédigea et fit signer au pape un ordre pour le prince Ludovisi de se tenir prêt à aller prendre le commandement des galères et de rejoindre l’escadre espagnole. Ce soin pris, sa sainteté fit des questions au secrétaire sur ce qui se passait en France. Vainement l’abbé s’efforça-t-il d’exposer aussi clairement qu’il lui fut possible le conflit d’intérêts qui avait fait naître la guerre de la fronde ; toutes ces subtilités politiques n’intéressèrent point le pontife, qui était toujours peu disposé à donner son attention aux affaires compliquées. « Au fait, dit-il à Segni, je crois devoir conclure de tout ce que vous me dites, que la France est peu tranquille, et que Mazarin a fort à faire au milieu de toutes ces bourrasques. Eh bien ! j’en suis enchanté ; et nous tâcherons d’en profiter pour reprendre Piombino et Porto-Longone aux Français pendant qu’ils se disputent chez eux. — L’affaire des cinq propositions de l’évêque Jansénius occupe toujours singulièrement le clergé français, saint-père, continua Segni. — C’est bon, c’est bon, interrompit brusquement le pape ; ne me parlez pas de cette maudite difficulté ; on ne m’en rompt que trop la tête ici. Il y a à Rome une bande de défenseurs de Jansénius qui m’obsèdent continuellement. À propos, Pancirole, dit-il en se tournant brusquement vers le ministre, avez-vous les yeux sur un certain monsieur de Saint-Amour, docteur en Sorbonne, ainsi que sur monsieur Hersent, cet ecclésiastique français qui se permet de faire à Rome, dans l’église de Saint-Louis, des sermons en faveur de la doctrine de ce Jansénius ? Il ne faut pas souffrir de pareilles choses ; c’est de l’hérésie en germe. Faites surveiller monsieur Hersent, et pour peu qu’il répète dans la ville ce qu’il a débité en chaire, qu’on le fasse conduire au saint-office. Je ne les empêche pas de se quereller