Page:Delécluze - Romans, contes et nouvelles, 1843.djvu/268

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par la voie publique, il y aurait de l’imprudence à ne pas en profiter ; faites-y bien attention ! »

Un sourire dédaigneux précéda l’interruption de la belle-sœur d’Innocent. « Si vous n’ajoutez pas, dit-elle, d’argument plus fort à ceux que l’on vient de faire valoir, ce n’était vraiment pas la peine que le ministre d’état cédât la parole au cardinal neveu pour répéter des lieux communs. » Et après ces mots, dona Olimpia, promenant son regard de bas en haut sur Astalli, et ensuite sur Pancirole avec l’expression de la menace et du mépris, elle se tourna vers le pape, qu’un étonnement douloureux maintenait toujours dans un silence morne.

Il y eut un moment d’hésitation entre dona Olimpia, qui sentait qu’elle ne pouvait plus reculer, et Pancirole, qui comprit que s’il ne poussait pas les choses à bout sur le moment, il laisserait la victoire à sa rivale. Déterminé enfin à user de toutes les ressources qu’il avait pour la réduire, il fit un signe significatif, et sans doute convenu, au cardinal neveu, qui se rapprocha avec gravité du pape et de sa belle-sœur, à qui il s’adressa. « Madame, dit Astalli en tirant de dessous son vêtement plusieurs objets qui semblaient pesants, je n’ai pas l’espoir de mieux dire que son éminence, et je regrette sincèrement que l’intérêt que vous portez à sa sainteté ne vous engage pas à prendre spontanément un parti que tout, tout, madame, répéta le cardinal neveu d’un ton solennel, vous fait une loi indispensable de suivre. Vous êtes dans l’erreur, madame : ce que vous ne considérez que comme des injures, nous sommes, le ministre d’état et moi, obligés de les considérer comme des avertissements. Sa sainteté, nous en sommes certains, ne nous démentira pas. Mais enfin, ajouta Astalli, qui s’aperçut que dona Olimpia se disposait à réveiller les sentiments de son beau-frère en sa faveur, s’il pouvait rester dans l’esprit du saint-père encore quelques doutes à ce sujet, malgré l’extrême répugnance que nous éprouvons, son éminence et moi, à fatiguer l’esprit et à chagriner l’âme du souverain pontife par l’exposition de détails repoussants, nous mettrions sous vos yeux des choses qui prouvent qui le bas peuple n’est pas seul préoccupé de ce