Page:Delécluze - Romans, contes et nouvelles, 1843.djvu/310

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traite de la cour, elle avait recommandé de redoubler de surveillance. Secrétaire des brefs, Azzolini, fort au courant des affaires par la nature même de ses fonctions, y portait une attention d’autant plus grande en ce moment, qu’ainsi que tout le monde, il s’attendait toujours à la mort prochaine d’Innocent X, avant laquelle il voulait profiter des bonnes dispositions de dona Olimpia à son égard, pour obtenir la pourpre. Sous des dehors gracieux et sémillants, le secrétaire des brefs, recherché dans les salons de Rome, tant à cause de ses connaissances dans l’antiquité que pour le talent facile avec lequel il tournait des vers, profitait habilement de l’importance que lui donnait sa charge et le plaisir que l’on prenait à l’entendre, pour ne se donner qu’un air de poëte et de savant, selon l’occasion, et éloigner toute défiance de ceux dont il avait intérêt de surprendre les intrigues ou les secrets. Il était dans les bonnes grâces de monseigneur Chigi, le successeur de Pancirole à la secrétairerie d’état ; Chigi, réputé diplomate habile depuis le congrès de Munster, homme sévère de mœurs, mesurant toutes ses paroles, mais dont la prudence avait cependant été mise en défaut par les dehors séduisants du confident dévoué de dona Olimpia. Le palais du bailli de Valencey, alors ambassadeur de France, ceux des ambassadeurs d’Espagne et de Venise, étaient les lieux de Rome où Azzolini avait le plus à apprendre, et où, par cette raison, il mettait le plus de légèreté apparente dans ses manières et sa conversation. Mais il s’attachait particulièrement à suivre et à connaître toutes les démarches du cardinal neveu Astalli, qui, par sa position, était au courant de tout, et dont on pouvait facilement tirer bien des choses en faisant appel à sa confiance et en flattant sa vanité. Dona Olimpia voulait la ruine d’Astalli, dont la politique n’était que la continuation affaiblie de celle de Pancirole, qui pendant tout le temps de son ministère avait constamment travaillé en secret à dégoûter Innocent de sa belle-sœur.

Dans l’ordre secondaire des ambitieux où se trouvait compris monseigneur Azzolini, il pouvait passer pour un sujet d’élite. Ne se faisant illusion ni sur son défaut de dignité, ni sur le point d’élévation auquel il lui était donné d’atteindre,