Page:Delécluze - Romans, contes et nouvelles, 1843.djvu/324

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

au milieu de nos deux familles, car vous en êtes l’âme... À ce soir, n’est-il pas vrai ? — J’obéirai aux ordres de sa sainteté, » répondit Olimpia en s’inclinant pour recevoir la bénédiction du pape. La vieille religieuse prit congé à peu près de la même manière, et Innocent suivit des yeux les deux dames en leur souriant jusqu’au moment où elles sortirent de sa chambre.

Leur entrée avait causé une surprise extrême au palais pendant leur entretien avec le pape, et le nombre des courtisans et des serviteurs s’était augmenté pour les voir sortir. On s’attendait à lire sur la figure de dona Olimpia le succès plus ou moins heureux de cette visite ; et en effet, quelques cardinaux et une foule de prélats, les uns intéressés à la réhabilitation, les autres à l’abaissement de la princesse, apprirent tout aussitôt dans quel sens le vent de la faveur avait tourné ; car tandis que la vieille sœur Agathe, fière de son succès, saluait en souriant indifféremment a tous, dona Olimpia, marchant avec tout le calme et la majesté d’une reine, passa entre les deux haies de curieux, à qui elle accorda un salut protecteur, ayant soin d’affecter de sourire en particulier à ceux qui n’avaient pas cessé de la servir pendant sa retraite.

Personne ne douta que la faveur de cette femme ne devînt plus grande que jamais, et en moins d’une heure cette importante nouvelle se répandit dans toute la ville de Rome. Antoine Barberin en fut un des premiers instruits. Ne perdant donc pas un seul instant, il se rendit aussi promptement qu’il put chez dona Olimpia, afin de se donner l’air d’être venu sans rien savoir de ce qui s’était passé au Vatican. Il attendit même quelque temps le retour de la princesse, qui avait fait à dona Agathe la galanterie de la reconduire à son couvent de Tor de’ Specchi.

Il serait difficile d’affirmer si dona Olimpia fut complètement dupe de Barberin en cette occasion ; mais comme elle avait pour habitude d’user toujours de réserve avec ceux même à qui elle croyait devoir accorder le plus de confiance, elle supposa aussitôt, sans toutefois en rien témoigner, que le cardinal savait déjà ce qui s’était passé chez le pape.